Demain, les patrons sonnent « l’alarme incendie » (Le JIR du 16.10.2013)

Demain, les patrons sonnent « l’alarme incendie » (Le JIR du 16.10.2013)

Les acteurs économiques crient au feu et tentent d’interpeller le ministre Lurel sur la situation de l’économie locale à la veille de son passage dans l’île.

Demain, à midi, les entreprises réunionnaises sont appelées à déclencher symboliquement leurs alarmes à incendie pour protester contre le projet de réforme des exonérations de charges patronales. Un message fort à la veille de la visite de Victorin Lurel dans l’île.

Exonérations de charges

Les patrons sont furieux et bien décidés à le montrer. Après les divers courriers sans réponses envoyés à Victorin Lurel, au Premier ministre ainsi qu’au chef de l’État, puis la rencontre infructueuse avec les parlementaires, la semaine dernière, la plateforme des 11 organisations professionnelles veut marquer un grand coup.

Demain, vers 12h30, elle appelle l’ensemble de ses adhérents à faire résonner leurs alarmes incendie sur les lieux de travail, pour alerter sur la gravité de la situation. D’autres actions pourront être menées, comme des rassemblements devant les mairies. Une opération qui fait étrangement écho aux entreprises agroalimentaires bretonnes qui ont, elles aussi, choisi cette forme de manifestation demain, à la même heure, contre la multiplication des plans sociaux…

L’enjeu local est différent : l’objectif est de protester contre la réforme des exonérations de charges sociales patronales en outre-mer imaginée par le gouvernement, dans le but de faire des économies. « Nous faisons retentir nos alarmes, parce qu’il y a le feu dans l’économie réunionnaise ! », explique la plateforme patronale locale dans un courrier envoyé aux entreprises et relayé hier par la Fedom (fédération des entreprises des Dom).

Une action symbolique qui interviendra à la veille de la visite dans l’île du ministre des Outre-mers, et alors même qu’aucune rencontre avec Victorin Lurel n’était programmée jusqu’à hier soir. « On est très remonté, car il n’aura sans doute pas de temps à consacrer aux affaires économiques », lâchait hier, exaspéré, Maurice Cérisola.

De 10 euros à 450 euros de charges en plus

Voici donc le quatrième étage de la fusée lancée par les acteurs économiques. Le « coup d’après », promis depuis quelques semaines par Dominique Vienne, le président de la Cgpme Réunion. Joint hier, celui-ci assurait que ce ne serait pas le dernier, tant que le projet ne serait pas retiré.

Dans le même temps, la Fedom, alertée par ses adhérents réunionnais, affiche désormais clairement son soutien. Dans sa lettre parue hier, l’organisation souligne que le recentrage des exonérations sur les bas salaires est contraire à l’objectif promis de soutenir la compétitivité des entreprises ultra-marines, puisque 43,65% des salaires dans les Dom seront directement impactés par la baisse des exonérations. Les entreprises ont fait leurs comptes et affirment qu’il est faux de prétendre, comme le fait le gouvernement, que le CICE (Crédit d’impôt compétitivité emploi) compensera cette baisse des exonérations.

La Fedom a calculé que pour des entreprises dont l’effectif est inférieur à 10 salariés, quel que soit le secteur d’activité, le cumul des mesures prévues conduira malgré tout à une hausse des charges de 9,51 euros dès 1,9 Smic, et jusqu’à 281 euros pour des salaires équivalent à 2,6 Smic. Pour les entreprises appartenant à un secteur prioritaire de la Lodeom, la hausse démarre à 2,2 Smic et est la plus forte à 2,9 Smic (+ 450 euros par mois). Ce qui fait peser un risque important sur l’emploi dans une économie locale déjà bien fragilisée. À son tour, la Fedom demande au gouvernement de retirer le projet de loi. Un amendement visant à le supprimer a été présenté aux députés ultramarins. Les organisations patronales font de son retrait un préalable avant de pouvoir engager la discussion et « trouver la meilleure solution », souligne Dominique Vienne. Celui-ci fait allusion à la main tendue de la députée socialiste Ericka Bareigts, laquelle s’est dit prête à porter un amendement à l’Assemblée nationale pour des économies, après un travail de concertation avec le patronat. Il reste peu de temps, le texte doit être discuté le 6 novembre à l’Assemblée.

Alors qu’ils se heurtent aux contraintes budgétaires avancées par le ministre, les acteurs économiques souhaiteraient voir d’autres éléments pris en compte dans la réflexion : un chômage galopant dépassant les 30% (43 000 chômeurs supplémentaires en 3 ans), une activité en berne et enfin une dette sociale et fiscale supérieure à 1,2 milliard d’euros.

Le gouvernement a annoncé hier une réunion d’urgence pour éteindre l’incendie social en Bretagne. Le monde économique réunionnais peut-il espérer le même niveau de mobilisation ?

Thomas Lauret

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