Discours de Jean-Marc Ayrault, Premier ministre lors de la restitution nationale des conférences économiques et sociales des Outre-mer
Paris, le 10 décembre 2012
Merci monsieur le ministre, cher Victorin.
Mesdames et Messieurs les députés ;
Mesdames et Messieurs les sénateurs ;
Mesdames, Messieurs les membres du Conseil économique et social et environnemental ;
Messieurs les présidents de régions ;
Mesdames, Messieurs les présidents des organismes consulaires, des Fédérations professionnelles et des syndicats de salariés.
Mesdames, Messieurs,
Victorin LUREL vient de le rappeler, mon gouvernement a engagé une action en profondeur sur les outre-mer. Je l’avais d’ailleurs dit aux parlementaires que j’avais reçus dès le 25 juillet.
Le ministre des outre-mer, Victorin LUREL, qui vient de s’exprimer devant vous, qui vous a fait une brève synthèse de vos travaux et des questions que vous avez traitées, je voudrais le remercier particulièrement pour son inlassable et remarquable travail. Et il l’a rappelé il y a quelques instants : mon gouvernement est déterminé à oeuvrer en profondeur et ce n’est pas une tâche facile, il y a l’urgence, vous le savez bien, c’est vrai d’ailleurs pas seulement pour les outre-mer, c’est vrai pour beaucoup de situations qui se posent à notre pays. Il faut faire face à ces urgences mais l’action du gouvernement ne vise pas seulement à colmater les brèches. C’est une action qui s’inscrit dans la durée et qui nécessite des réformes en profondeur. Ca vaut aussi pour les outre-mer et Victorin LUREL l’a rappelé il y a quelques instants et donc je voudrai saluer cet engagement, cette détermination. Il a évoqué la mission qui a été confiée à Serge LETCHIMY et c’est vrai qu’en février lorsqu’il paraîtra son rapport, je pense que nous aurons là des pistes que nous devons examiner pas seulement au gouvernement mais aussi avec vous et qui nous permettront d’engager les changements dans la durée. Donc aujourd’hui, ces travaux qui se concluent, c’était avec les acteurs du monde économique et social des outre-mer.
Et je voudrais vous remercier, vous féliciter, pour le travail qui a été réalisé dans ces conférences. Il y a eu des débats, des confrontations, mais c’est normal, c’est nécessaire mais il y a eu aussi des propositions précises et concrètes. Cela prouve, en tout cas, que la méthode de l’écoute et du dialogue, la méthode de la concertation, c’est la bonne solution. Ce n’est pas de se hâter pour prendre des décisions qui n’auraient pas d’efficacité. C’est ensemble une fois que l’on a fait le bon diagnostic oeuvrer en profondeur. Donc c’est la méthode que vous avez utilisée et vos travaux l’ont souligné.
Ce qui est revenu souvent, c’est la lutte contre la vie chère. Et nous ne sommes pas au bout du compte, vous le savez bien. C’est pourquoi c’est et ça restera une des priorités de l’action publique outre-mer. C’était, c’est vrai, un des engagements du Président de la République que nous avons concrétisé sans attendre dans la loi qu’a présentée Victorin LUREL et qui a été approuvée par le Parlement, la loi sur la régulation économique et qui a été promulguée en moins de six mois. C’est vrai que c’était une priorité. Une loi qui a pour objectif d’agir en profondeur sur le fonctionnement des marchés ultramarins en y introduisant plus de concurrence, et en luttant contre les comportements de rente qui malheureusement sont à l’origine souvent des prix excessifs. C’est une bataille ; une loi est une loi, c’est son application qui compte. Et à terme, ce que nous souhaitons, c’est en effet plus de compétitivité pour l’économie ultramarine, qu’elle soit davantage capable elle-même de faire face aux besoins et Victorin LUREL vient d’évoquer des exemples très concrets.
Le gouvernement précédent avait choisi de multiplier des mesures et des annonces. Je viens de le dire, il s’agit d’inscrire les changements dans la durée, sans toutefois – et c’est ce qui a inspiré le gouvernement – interrompre brutalement les anciens dispositifs. Ce qui est important, c’est de réussir la transition.
Ainsi, le Revenu supplémentaire temporaire d’Activité, le RSTA, qui est une mesure qui a été qualifiée de « temporaire » et qui a été mise en place après les crises sociales de 2009 sans dispositif d’accompagnement avant son extinction le 31 décembre prochain, elle va être prolongée jusqu’au 31 mai 2013. Cela permettra au ministère des Affaires sociales d’accompagner de manière beaucoup plus active le basculement d’un maximum de bénéficiaires du RSTA vers le Revenu de Solidarité active (RSA). Donc ça ne s’improvise pas, d’où le temps nécessaire.
Le gouvernement proposera également une méthode pour traiter l’autre dispositif transitoire d’exonération de charges sur les bonus versés par les employeurs aux salariés, mécanisme qui est lui aussi issu des crises de 2009, toujours transitoire. Et je m’engage à trouver la solution et dans ce cadre, j’ai décidé de prolonger jusqu’à la fin de l’année 2013 les dispositifs transitoires d’exonération de charges sur les bonus versés par les employeurs. Donc ce qui nous donne plus de temps pour réussir à trouver ensemble la solution d’autant que, vous le savez, le gouvernement a décidé, je l’ai annoncé le 6 novembre dernier, la mise en place du Pacte national pour la Croissance, la Compétitivité et l’Emploi, notamment à travers – et le Parlement a bien voulu accepter d’accélérer le calendrier –, la mise en place du crédit d’impôt pour la compétitivité qui viendra, qui prendra effet le 1er janvier 2013. Eh bien, dans ce cadre là, l’objectif du gouvernement, c’est d’éviter de pénaliser le pouvoir d’achat des salariés, tout en accompagnant les entreprises dans la fin de ces dispositifs dérogatoires. Et donc je pense que nous pouvons travailler efficacement et surtout en confiance parce que l’objectif, c’est bien de trouver la solution.
A Mayotte, le montant de la prestation d’aide à la restauration scolaire, qui est aujourd’hui très faible, fera l’objet d’un rattrapage à 100% des montants unitaires des repas et collations, dès le 1er janvier 2013. J’ai considéré également que la revalorisation du RSA à Mayotte devrait atteindre 50% du niveau national à la fin de 2013, avec une première étape de revalorisation significative dès le 1er janvier prochain.
Les travaux organisés dans le cadre des conférences économiques et sociales ont également fait ressortir plusieurs convergences, tant sur le constat que dans les propositions, sur lesquelles je souhaiterais revenir.
D’abord, je voudrais parler du financement des entreprises, essentiellement, pour des PME et des TPE pour l’outre-mer, la demande générale est de remédier au déficit d’ingénierie financière et au manque de compétence technique et administrative.
Vous attendez que l’Etat affiche une véritable vision du développement économique ; vous attendez qu’il joue un rôle de stratège, vous attendez qu’il définisse, en partenariat avec les collectivités locales, notamment les régions, des priorités claires qui seront portées dans la durée.
Cette demande rejoint justement les ambitions que j’ai évoquées qui sont contenues dans le Pacte national pour la Croissance, la Compétitivité et l’Emploi, et qui vise en priorité, et dans tous les territoires, les filières agricoles et agroalimentaires, mais également le tourisme et le secteur du bâtiment. Parce que le pacte de compétitivité, ce n’est pas seulement un crédit d’impôt et après, débrouillez-vous. C’est une nouvelle organisation en filières, grands groupes, PME, entreprises de sous-traitance, accompagnement de l’innovation, accompagnement pour le financement en trésorerie, accompagnement dans le cadre des pôles de compétitivité, à l’export, tout ce qui doit être fait pour redynamiser notre économie. Donc le crédit d’impôt il est là pour donner, j’allais dire, des marges de manoeuvre qui avaient disparu mais ce n’est pas l’essentiel. C’est un élément fondamental pour rétablir de la confiance mais en même temps, ce que nous proposons aux entreprises, et aussi aux salariés, et aussi aux territoires, c’est un pacte ; et donc un pacte, c’est bien un engagement réciproque. Quand on a parlé de donnant / donnant sur le pacte de compétitivité, on s’est demandé s’il s’agissait d’une approche juridique, administrative et bureaucratique. Non ! Mais un engagement où on se fixe un objectif ambitieux qui est redresser notre économie, la moderniser et s’agissant des outre-mer de lui donner justement cette capacité qui lui manque à exister par elle-même et pas seulement à chaque crise où on se penche sur les difficultés et les problèmes. Donc voilà la démarche qui est la nôtre.
Et s’agissant justement de la politique de l’emploi, de la formation et du dialogue social, vous avez manifesté clairement le souhait d’une modernisation des relations sociales dans l’entreprise. Et c’est justifié. Ca rejoint complètement les débats de la grande conférence sociale qui s’est tenue les 9 et 10 juillet derniers, au Conseil économique et social et environnemental qui donnent lieu depuis à des négociations spécifiques. Ca vaut pour l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes mais ça vaut aussi pour les contrats de génération, maintien dans l’emploi d’un sénior, embauche d’un jeune en CDI qui ont fait l’objet d’une négociation et d’un accord de toutes les organisations syndicales et patronales et qui va se traduire par un projet de loi qui va être bientôt adopté par le Parlement. Et puis, c’est la grande négociation qui est en cours, qui, j’espère aboutira sur la sécurisation des parcours professionnels. D’un côté prendre en compte les mutations économiques auxquelles sont confrontées les entreprises avec leur personnel, mieux anticiper les risques de crise et de l’autre côté aussi, faire reculer la précarité en particulier la précarité des contrats de travail en CDD, en intérim et beaucoup d’autres sujets qui seront sur la table. On sait que la négociation n’est pas simple, qu’elle est parfois dure mais j’espère que nous aboutirons, en tout cas que les partenaires sociaux aboutiront parce que ce serait une vraie avancée et c’est dans cet esprit que vous voulez vous aussi vous inscrire dans les outre-mer et vous avez raison. En tout cas, tout cela participe aux priorités que le gouvernement s’est fixées.
De ce point de vue, la loi sur la création de la Banque publique d’Investissement, la BPI, qui est en cours d’examen par le Parlement est aussi un engagement concret, très concret qu’avait pris le président de la République. Vous vous souvenez de ce « je ne suis pas un ennemi de la finance mais je veux que la finance soit au service de l’économie. » Là, nous sommes au coeur de la question ; nous ne sommes pas simplement dans des effets d’annonce ou des discours, des formules. La Banque publique d’Investissement, c’est l’outil que nous nous donnons et qui doit avec les territoires au plus près du terrain aider les entreprises et en particulier les PME, les PMI avec les TPE mais toutes les filières qu’il faudra réorganiser dans l’esprit du pacte que j’évoquais il y a quelques instants. Et dans quelques jours, le conseil des ministres adoptera une autre loi sur la finance. C’est la séparation dans la gestion des banques de la partie des dépôts et des prêts et avec la partie spéculative que certaines banques organisent pour bien mettre là encore la finance au service de l’économie et en particulier de ceux qui ont le plus de difficultés à accéder aux crédits. Les grands groupes accèdent au crédit par le marché mais la grande masse des entreprises, des PME, des TPE parfois même ont des difficultés à avoir un prêt en trésorerie et qui, si elle ne l’obtient pas, c’est l’entreprise qui disparait et l’emploi avec. Donc il faut changer les règles du jeu et je veillerai à ce que le dispositif de la Banque publique d’Investissement et les produits qu’il offrira soient mis en place rapidement, sans qu’aucun territoire ultramarin ne reste à l’écart, dans le respect, naturellement, des compétences de chacun. Il faudra faire preuve là encore de souplesse, d’imagination pour prendre les mesures d’adaptation nécessaires, notamment pour tenir compte du fait que les acteurs du financement de l’économie ne sont pas les mêmes outre-mer et dans l’hexagone;
La doctrine d’intervention de la BPI et les produits qu’elle développera devront également être conçus et adaptés aux besoins spécifiques de ces territoires. Ce sera l’une des premières missions du nouveau directeur général, à qui je demanderai de faire des propositions en ce sens dès les premiers temps de sa nomination officielle lorsque la banque sera effectivement créée et en concertation avec les acteurs concernés et avec évidemment l’engagement du ministre des outre-mer, Victorin LUREL.
Le gouvernement a également décidé de répondre aux situations d’urgence de certaines TPE. Je sais que les Préfets sont mobilisés et ils s’appuient pour cela sur les Comités Départementaux d’Examen des difficultés de Financement des entreprises (les CODEFI) et, pour les dettes fiscales et sociales, sur les Commissions départementales des Chefs des Services Financiers (les CCSF). Je souhaite que ces instances tiennent encore mieux compte d’une situation particulière aux outre-mer et aussi fassent attention à la défaillance de certains donneurs d’ordre publics. Il n’est pas normal, par exemple, qu’une PME ne soit pas payée par un hôpital public et pénalisée parallèlement pour non-paiement de cotisations patronales. Certaines grosses entreprises peuvent le supporter, mais vous savez bien que les TPE sont en incapacité de le faire. Je l’ai dit le 6 novembre : l’Etat et l’ensemble des administrations publiques doivent être exemplaires en matière de délai de paiement, et il faut que ces défaillances soit prises en compte lorsqu’on examine la situation individuelle d’une entreprise.
Je demande donc que les CCSF, pour établir leurs plans d’étalement des remboursements des dettes sociales des PME et conclure des moratoires, tiennent systématiquement compte des créances que les entreprises en cause détiennent sur les collectivités publiques. Lorsque cela sera possible, il faudra que les actions en recouvrement, qui peuvent entraîner des pénalités, cessent à hauteur des créances sur des organismes publics, ou ouvrent de plein droit une possibilité de moratoire automatique.
Pour les TPE en-dessous d’un certain seuil de chiffre d’affaires ou de salariés, j’ai demandé aux ministres concernés de me faire des propositions pour mettre en place, pour les dettes inférieures à un certain montant, des dispositifs de rachat des passifs et des actifs publics.
D’autres propositions concrètes – là on est vraiment dans le concret – sont remontées des conférences locales, par exemple celle de la Fédération nationale des TPE (FTPE), que je tiens à saluer, et qui propose de développer outre-mer une mesure d’emploi partagé qu’elle a nommé « 4 TPE pour 1 emploi ». Voilà, ce n’est pas un slogan, c’est une ambition et il s’agit pour plusieurs entreprises associées de mutualiser certaines de leurs fonctions support comme, comme l’administration, la comptabilité ou la réponse aux appels d’offre.
Et pour atteindre cet objectif, je demande que dans chaque département, les services de l’Etat et de Pôle emploi apportent leur soutien à ces initiatives en favorisant l’émergence de groupements d’employeurs. Ce dispositif, par la solidarité financière sur laquelle il repose et le statut qu’il offre, est sécurisant pour les entreprises comme pour les salariés.
Dans le secteur de l’agriculture, si important dans l’économie ultramarine, l’un des enjeux majeurs est la diversification des productions et l’approvisionnement du marché local par des productions locales. Et pour tenir compte des difficultés spécifiques à l’agriculture ultramarine, notamment l’insularité, l’éloignement, et la difficulté d’accès au foncier, la loi d’avenir de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt que présenteront Stéphane LE FOLL et Guillaume GAROT comportera un titre spécifique aux outre-mer. Le projet de loi sera examiné par le Parlement durant le deuxième semestre de l’année prochaine.
J’ai demandé donc aux deux ministres qui travaillent actuellement sur l’avant-projet en liaison étroite évidemment avec le ministre des Outre-mer d’assurer une large concertation avec les socioprofessionnels concernés, et bien sûr les collectivités territoriales.
Les conférences ont également fait émerger – et Victorin LUREL y a fait allusion – la demande d’une politique de visas plus active pour faciliter les déplacements d’affaires et l’intégration économique régionale des outre-mer. Une première décision a donc été prise en matière de tourisme pour permettre, à partir du 1er janvier 2013 aux citoyens d’Afrique du Sud de séjourner à La Réunion sans visa. Je demande aux ministres concernés, dans le cadre des travaux engagés au titre du pacte de compétitivité, de poursuivre dans cette voie et de mettre en oeuvre, lorsque les migrations sont maîtrisées ou les garanties suffisantes, une politique de visas d’affaires plus volontariste, vers les pays proches qui peuvent être des partenaires commerciaux importants. Je pense évidemment à Madagascar, l’Inde pour La Réunion, ou au Brésil pour les Antilles et la Guyane. Cette politique doit aussi nous permettre de négocier une réciprocité pour les chefs d’entreprise ultramarins.
Et pour concilier le développement économique et le progrès social, les conférences ont révélé une forte demande de modernisation du dialogue social outre-mer. Je l’ai dit mais cela pose naturellement la question des acteurs de ce dialogue, y compris des acteurs locaux, dont la diversité doit pouvoir trouver à s’exprimer dans les instances impliquant les partenaires sociaux. Mais ce débat, je l’ai dit, ne doit pas être esquivé. Il est de la responsabilité du gouvernement de l’engager mais il est aussi de la responsabilité des organisations syndicales de salariés et d’employeurs de se saisir de ces questions et de faire des propositions. Ce n’est pas le gouvernement qui les fera à leur place. Par exemple, les conditions dans lesquelles une convention collective nationale est applicable dans les départements d’outre-mer doivent être précisées de façon à éviter les situations où des branches n’ont aucun cadre conventionnel. Pourquoi ? Faute de négociation locale et faute d’appliquer les accords nationaux. Donc c’est absurde, ça doit pouvoir changer, je le pense. Je demande au ministre du Travail et à celui des Outre-mer de lancer une mission qui devra leur remettre des recommandations sur les leviers de modernisation du dialogue social outre-mer pour répondre à ces questions.
Dans le domaine social, les débats ont également confirmé l’impact de la crise sur les outre-mer, où le taux de pauvreté est déjà nettement plus élevé qu’en métropole. 31% des ménages en moyenne sont touchés, beaucoup plus dans certains territoires. Les familles monoparentales, les familles nombreuses pauvres sont surreprésentées. J’annoncerai demain, en clôture de la conférence contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, les grandes orientations d’un plan national. Ce plan marquera à la fois un changement de regard, un changement de méthode et un changement d’ambitions. Et dans les DOM, la lutte contre la pauvreté sera une priorité du gouvernement.
Pour répondre, enfin, à la demande qui a été très souvent exprimée d’une vision stratégique de l’Etat en matière de soutien à l’économie, le gouvernement a décidé de mettre en cohérence les dispositifs actuels, ou de les rénover, sur la base de choix stratégiques clairs, à la fois sur les filières – je l’ai évoqué – mais aussi sur les instruments à privilégier.
Dans ce cadre, deux chantiers vont être menés en 2013 :
Le premier, c’est est celui des financements. Les débats sur la défiscalisation ont montré qu’il y avait sur ce sujet beaucoup d’incompréhension, beaucoup de crispation. Il faut les surmonter et trouver des solutions plus consensuelles. Mais vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, Victorin LUREL, j’ai veillé à ce que, je le disais tout à l’heure, il n’y ait pas de rupture parce que cette tentation existait y compris, vous l’avez noté, dans l’opinion publique. Certains disaient « les niches fiscales mais pourquoi garder celles sur l’outre-mer ? » Eh bien parce que nous avons été attentifs à la réalité, à ce que vous nous avez dit, les alertes que vous avez exprimées et donc ça ne veut pas dire que pour autant, on ne va rien bouger, qu’il n’y a rien à changer évidemment ! Mais le gouvernement justement a engagé une réforme et qui prend du temps nécessairement puisqu’il faut se concerter et pas se tromper dans les solutions, une réforme du financement de l’économie qui a bien entendu vocation à s’appliquer aux régions d’outre-mer, mais en tenant compte des fortes spécificités de ces territoires. Donc c’est ce que j’ai demandé à Victorin LUREL et qui bien sûr s’y est déjà attaqué avec une volonté d’une vision stratégique globale dans cette réforme des financements de l’économie dans les outre-mer. Il s’agira notamment de mettre en cohérence les systèmes d’exonération de charges, d’aides fiscales, de mobilisation de l’épargne et d’accès au crédit qui existent en outre-mer et dont certains doivent être adaptés. Cette réforme devra respecter l’engagement du Président de la République de préserver les flux financiers globaux, tout en améliorant leur efficacité parce que c’est bien le but. Ce n’est pas de créer des injustices, ce n’est pas de reculer, c’est d’être aussi engagé mais avec le souci de l’efficacité pour que vous-mêmes, les responsables et aussi les populations, voient des résultats concrets qui sont à la base même d’une confiance durable.
J’ai parlé de deux chantiers. Le second chantier et celui de la structuration de l’économie autour des filières où les économies d’outre-mer disposent de véritables atouts mais encore faut-il les valoriser parce qu’il y a des retards, il faut les combler. Et il s’agit – les conférences locales l’ont fait ressortir très clairement –, de l’agriculture, de l’agroalimentaire, du tourisme, de l’énergie, et du logement. La structuration des filières agroalimentaires, par exemple, est encore trop embryonnaire dans certains départements. Il faut rationaliser les circuits mais le faire en amont, soutenir la production, favoriser le développement d’activités de transformation en aval pour renforcer la valeur ajoutée produite localement et qui fait trop souvent défaut.
Et sur la transition énergétique, qui est un vaste défi pour la France, parce que l’on n’échappera pas à cette question, nous ne sommes pas simplement dans une crise, on parle de crise, oui il y a une crise mais nous sommes aussi à un moment historique de notre histoire. C’est une mutation que nous sommes en train de vivre et la mutation énergétique, il faut la dominer, il faut la maîtriser, adapter notre modèle sans le déstabiliser. C’est le chantier qui a été lancé la semaine dernière et nous devons avancer beaucoup plus résolument sur plusieurs projets structurants. Et je pense en particulier aux atouts de l’outre-mer en la matière. Il y en a beaucoup mais je ne vais pas développer davantage le sujet ici, vous le connaissez aussi bien que moi mais les outre-mer peuvent même être en avant-garde sur ces questions environnementales : la question énergétique, la question de la biodiversité où…c’est là qu’elle est la plus présente, et qui est aussi une richesse et un atout. Et dans le domaine du tourisme, là encore, il faut être imaginatif et coordonner davantage l’offre existante mais il s’agit aussi de la rénovation des outils, des hôtels en particulier mais il s’ait aussi de la formation des personnels, il s’agit aussi de travailler sur les contrats de destination qui impliquent les compagnies aériennes, énormément de travail à faire mais déjà beaucoup de propositions ont été faites par tous les acteurs économiques et sociaux et les élus des territoires. Faut-il encore qu’à un moment, ils soient regroupés et qu’ils débouchent sur des projets concrets et sur des actes et des engagements.
En tout cas, vous le voyez, le gouvernement ne manque ni d’ambition ni de détermination. J’ai souvent parlé ces derniers temps de nouveau modèle français. Vous savez, la politique du gouvernement, ce n’est pas la politique sociale libérale comme je l’ai vu ici ou là. La politique sociale libérale qui se traduit dans trop de pays autour de nous en Europe, c’est la baisse des salaires, c’est la hausse des pensions, c’est la baisse des prestations sociales ou familiales, c’est la baisse des aides au logement, et donc c’est un appauvrissement qui paraît-il est la base de la compétitivité. Non, nous, quand nous parlons de compétitivité, nous parlons de compétitivité économique mais nous devons aussi parler de compétitivité sociale et de compétitivité territoriale. Mais ça nécessite pour que ça marche dans une période où nous devons en même temps lutter contre la dette et les déficits de faire preuve d’imagination, de créativité pour réorganiser, parfois refonder, parfois répondre aussi – j’ai parlé de la transition énergétique – à des questions nouvelles mais sans abandonner ce que nous sommes, sans abandonner nos valeurs et donc qui sont au coeur même du pacte républicain. Donc pour moi, le modèle, c’est le modèle social et républicain qui au coeur même de son identité a le principe d’égalité et c’est ce principe d’égalité qui doit guider nos actions. Donc refonder le modèle, ce n’est pas abandonner les valeurs ; c’est leur redonner toute leur force. C’est pourquoi je parle de « nouveau modèle français » mais ce nouveau modèle français, il vaut pour la métropole comme pour les outre-mer. Il ne se fera pas seul, il se fera avec le concours des Françaises et des Français, de tous ceux qui ont envie de réussir et ceux qui sont là aujourd’hui ont envie de réussir.
A l’avance, je vous remercie et bon courage !