Lettre Hebdo N°48 du 1er octobre 2012
Tendance
La loi de régulation économique ou la tentation de la réglementation des prix
Le projet de loi tel qu’il a été voté par le Sénat revient, même furtivement, sur la définition des pratiques anticoncurrentielles en remplaçant la notion de prix ou marges abusifs par celle de prix ou marges élevés.
Par ailleurs, ces prix ou marges sont considérés comme élevés en comparaison avec ceux du secteur, sans qu’il soit précisé quel est ce secteur étalon pris en compte.
Ce flou juridique renforce forcément les possibilités d’action des instances administratives.
Il prévoit aussi la négociation de prix sur un certain nombre de produits de première nécessite à définir et le recours à la réglementation des prix si ces négociations n’aboutissent pas.
Le prix administré apparait donc comme le recours, au moins cosmétique, au problème de la vie chère.
Espérons qu’il n’en sera rien et que les diverses négociations que la loi sous-tend sauront se mettre en place dans l’intérêt même du consommateur.
Conseil des ministres
Le projet de loi de finances pour 2013
Le compte rendu officiel du conseil des ministres n’offre aucune information particulière par rapport à ce que les media diffusent depuis plusieurs jours déjà.
Cependant, le projet de loi est disponible, en voici, après une première lecture les mesures qui concernent les entreprises, la défiscalisation et l’aide au logement.
Fiscalité des entreprises
– Limitation de la part des charges financières nettes déductibles :
Cette part sera fixée à 85 % pour les exercices 2012 et en 2013, puis ramenée à
75 % à compter des exercices 2014.
S’agissant des sociétés membres d’un groupe fiscalement intégré, la mesure de plafonnement s’appliquera aux seules charges financières nettes qui résultent d’opérations réalisées avec des sociétés hors du groupe.
Le dispositif de limitation ne s’appliquera pas lorsque le montant total des charges financières nettes est inférieur à 3 millions d’euros.
– Limitation de l’avantage lié à l’exonération totale des plus-values à long terme réalisées par les entreprises à l’occasion de la cession de titres de participation (dite « niche Copé »)
Les plus-values sur les titres de participation réalisées par les entreprises ne supportent pas aujourd’hui d’impôt sur les sociétés. Les frais supportés pour l’acquisition et la gestion de ces titres sont néanmoins déductibles de l’impôt. En contrepartie, une quote-part représentative de frais et charges, et égale à 10 % des plus-values nettes de l’exercice, est réintégrée au résultat fiscal.
Désormais cette quote-part de frais et charges sera calculée non plus sur le montant net des plus-values de cessions de titres de participation mais sur le montant brut.
– Elargissement du crédit d’impôt recherche :
Extension du régime du crédit d’impôt à certaines dépenses d’innovation réalisées par les PME en aval de la recherche et du développement, portant sur les activités de conception de prototypes de nouveaux produits ainsi que sur les installations pilotes. Ces nouvelles dépenses concernent les dotations aux amortissements des immobilisations, créées ou acquises à l’état neuf par les PME, et qui sont affectées directement à la conception de prototypes de nouveaux produits, autres que les prototypes de recherche.
Certaines dépenses liées seront également admises comme les frais de personnel ou de fonctionnement, ainsi que les frais relatifs aux brevets, dessins et modèles.
Ces dépenses entreront dans la base du crédit d’impôt dans la limite de 400 000 euros par an à un taux d’aide de 20 %.
– Abaissement du plafond d’imputation des déficits reportables.
L’imputation des déficits antérieurs sur le bénéfice constaté au titre d’un exercice ne sera possible qu’à hauteur d’un plafond égal à 1 million d’euros, majoré d’un montant dorénavant égal à 50 % (contre 60% avant la réforme) du bénéfice imposable de l’exercice excédant cette première limite.
En revanche, la part de déficit qui ne peut être déduite reste reportable sur les exercices suivants, sans limitation de durée et dans la même limite.
Ces dispositions s’appliqueraient aux exercices clos à compter du 31 décembre 2012, c’est-à-dire sur l’exercice 2012.
– Abaissement à 250M€ contre 500M€ du chiffre d’affaires à partir duquel le dernier acompte d’IS doit être acquitté (grandes entreprises)
– taxation supplémentaire de 7 % sur les sommes placées sur la réserve de capitalisation des entreprises d’assurance.
Défiscalisation
Le projet de loi dispose que :
Le total des avantages fiscaux à l’exception de ceux mentionnés aux articles 199 undecies A, 199 undecies B et 199 undecies C, ne peut pas procurer une réduction de l’impôt dû supérieure à un montant de 10 000 euros.
Le total des avantages retenus dans la limite de 10 000 euros, majoré du montant de ceux mentionnés aux articles 199 undecies A, 199 undecies B et 199 undecies C, ne peut pas procurer une réduction de l’impôt dû supérieure à la somme d’un montant de 18 000 euros et d’un montant égal à 4 % du revenu imposable.
Comme le 199 undecies D n’est pas modifié, on peut considérer que les plafonds de 40 000€ ou 15% du revenu imposable pour le 199 undecies C et de 30 600€ ou 13% du revenu imposable pour le 199 undecies B ne sont pas modifiés, mais doivent s’inscrire sous le plafond global de 18 000€ plus 4% du revenu imposable.
C’est-à-dire que pour l’outre-mer, il n’y a, pour l’instant, aucun changement y compris dans le mode de calcul des avantages fiscaux sous plafond avec prise en compte de la rétrocession.
Le dispositif Malraux et les SOFICA sont comptabilisés hors plafond.
Aide au logement
Le nouveau dispositif fiscal d’incitation à l’investissement locatif, suite du Scellier, qui sera inclus dans le plafonnement global de 10 000€ des niches, présente les principales caractéristiques suivantes :
– réduction d’impôt sur le revenu (IR) de 18 % applicable aux contribuables qui acquièrent ou font construire du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2016 des logements neufs ou assimilés qu’ils s’engagent à donner en location nue à usage d’habitation principale du locataire pendant une durée minimale de neuf ans .
– la réduction d’impôt s’applique également aux souscriptions de parts de société civile de placement immobilier (SCPI) réalisant les mêmes investissements.
– la réduction d’impôt est calculée, selon le cas, sur le prix de revient des logements, retenu dans la limite d’un plafond par mètre carré de surface habitable, ou sur 95 % du montant de la souscription, dans la limite d’un montant global annuel de 300 000 €.
– les investissements ouvrant droit au bénéfice de l’avantage doivent être situés dans des zones limitées, qui présentent un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements. Toutefois, dans les zones où ces besoins sont localisés (zone B2), la réduction ne s’appliquera qu’aux logements situés dans des communes ayant fait l’objet d’un agrément du Préfet de Région.
– l’avantage fiscal est réservé exclusivement aux logements respectant la réglementation thermique entrant en vigueur au 1er janvier 2013 (RT 2012), ou bénéficiant du label « BBC 2005 », pour ceux non soumis au respect de cette réglementation, ou, pour les logements rénovés, de ceux justifiant d’un certain niveau de performance énergétique.
– au titre d’une même année d’imposition, le contribuable ne peut bénéficier de la réduction d’impôt qu’à raison d’un seul logement, sans préjudice de la possibilité de bénéficier au titre de la même année de cet avantage fiscal au titre également de la souscription de parts de SCPI éligibles dans la limite du plafond global de 300 000 € précité ;
– pendant toute la période couverte par l’engagement de location, les loyers ne doivent pas excéder des plafonds réglementaires qui seront fixés à un niveau intermédiaire entre le parc social et le marché libre et les locataires devront satisfaire à certaines conditions de ressources.
-Sera également instaurée une limitation du nombre de logements pouvant être éligibles à la réduction d’impôt au sein d’un même immeuble, sanctionnée par une amende à la charge des promoteurs cédant une proportion excessive de logements en vue d’un usage locatif ouvrant droit à l’avantage fiscal ;
– le Préfet de Région pourra, sur avis du comité régional de l’habitat, minorer les plafonds de loyers.
Le dispositif fera l’objet d’une évaluation préalable au dépôt du projet de loi de finances pour 2015 qui déterminera les conditions de son évolution.
Brèves
Lors de l’audition du 28 septembre des ministres de l’économie et du budget devant la commission des finances de l’Assemblée nationale, Gilles Carrez a interpellé les ministres sur le maintien du plafonnement de la défiscalisation outre-mer en critiquant cette mesure qui ne profite qu’à de riches contribuables qui achètent des bateaux de luxe.
A ce propos, pour le moins étonnant et décevant dans la bouche d’un parlementaire dont la compétence et le sérieux sont unanimement reconnus, le ministre du budget a répondu que cette mesure ne signifiait nullement qu’il ne fallait pas repenser la défiscalisation outre-mer, mais qu’une telle réforme, qui aurait lieu, ne pouvait se faire dans la précipitation sauf à perturber gravement les économies ultramarines.