Avis du CESE sur la coopération régionale outre-mer

Avis du CESE sur la coopération régionale outre-mer

 

 LES AVISDU CONSEILÉCONOMIQUE,SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Pour un renforcement de la coopération régionale des Outre-mer

Rémy-Louis Budoc

Mai 2012

Les éditions desJOURNAUX OFFICIELS

2012-09

NOR : CESL1100009X

Mercredi 16 mai 2012

JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Mandature 2010-2015 – Séance du 9 mai 2012

POUR UN RENFORCEMENT DE LA COOPÉRATION RÉGIONALE DES OUTRE-MER

Avis du Conseil économique, social et environnemental

présenté par M. Rémy-Louis Budoc, rapporteur

au nom de la délégation à l’Outre-mer

Question dont le Conseil économique, social et environnemental a été saisi par décision de son bureau en date du 22 mars 2011 en application de l’article 3 de l’ordonnance no 58-1360 du 29 décembre 1958 modifiée portant loi organique relative au Conseil économique, social et environnemental. Le bureau a confié à la délégation à l’Outre-mer la préparation d’un avis : Pour un renforcement de la coopération régionale des Outre-mer. La délégation à l’Outre-mer, présidée par M. Jean Frémont, a désigné M. Rémy-Louis Budoc comme rapporteur.

2 – Avis du Conseiléconomique, socialet environnemental

Sommaire

                Synthèse de l’avis ___________________________ 4

Avis ________________________________________ 9

 

Introduction 9

Enjeux et horizons de la coopération régionale 10

Un concept à clarifier 10

Les zones d’influence de la coopération 11

Les enjeux essentiels 11

Comment renforcer la coopération régionale 12

Assurer les fondamentaux préalables 12Mettre en oeuvre les moyens juridiques, financiers et institutionnels disponibles 13

Dépasser les contentieux territoriaux existants 16

Disposer des bonnes infrastructures de désenclavement 17

 

Refonder la gouvernance de la coopération régionale 18Mieux coordonner l’action des différents acteurs de la coopération intervenant dans la zone géographique des territoires ultramarins 18

Mieux connaître et répertorier les actions de coopération menées dans un pays ou un territoire 19

Développer et systématiser les commissions mixtes transfrontalières 20

Mieux former les personnes en charge de la coopération régionale 20

Mieux impliquer la société civile, condition de réussite des projets 21

 

Cibler en priorité les projets répondant aux intérêts réciproques 22Hiérarchiser et mieux définir les objectifs de la coopération régionale 22

 

 

Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 3

                Recentrer une partie de la politique de coopération de la France sur les zones géographiques des territoires ultramarins 25

 

..Pour une nouvelle politique européenne de grand voisinage basée sur le développement humain 26Mettre en place une politique de Grand voisinage dans les zones de coopération des Outre-mer 26

Créer un GECTultrapériphérique pour fédérer les acteurs et promouvoir l’émergence de projets 27

Apporter des réponses à la problématique FED/FEDER 28

Instaurer un fonds « miroir » en faveur des partenaires étrangers 29

Prévoir des études d’impact dans les négociations commerciales tenant compte des territoires ultramarins 29

 

 

Conclusion 31

Déclaration des groupes ____________________ 32

Scrutin ____________________________________ 44

 

Liste des personnes auditionnées _______________ 46

Table des sigles _______________________________ 47

Bibliographie _________________________________ 49

4 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

POUR UN RENFORCEMENT DE LA COOPÉRATION RÉGIONALE DES OUTRE-MER

Synthèse de l’avis1

Depuis au moins une décennie, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, La Réunion, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et Miquelon, les Terres australes et antarctiques françaises et Wallis-et-Futuna coopèrent de manière plus structurelle avec les pays et territoires de leur zone géographique respective. Cette coopération porte sur des projets relevant des domaines économique, social, sanitaire, culturel, éducatif, environnemental, scientifique, etc. Elle dispose d’outils juridiques à la fois communs à l’ensemble des collectivités territoriales et spécifiques aux territoires ultramarins. Elle bénéficie également de nombreux dispositifs et leviers au niveau européen.

Les espaces concernés par cette coopération sont vastes : la Caraïbe, le Plateau des Guyanes, l’ouest de l’Océan Indien, l’Océanie et les régions autour de Terre-neuve. Cette coopération régionale favorise la création d’un espace d’échanges et pourrait contribuer fortement à améliorer la diversification et l’internationalisation des économies ultramarines, en créant des emplois stables et de qualité. Elle devrait également faire des Outre-mer, des catalyseurs de développement dans leur zone géographique respective et des frontières actives de l’Europe.

Dans le contexte actuel de crise mondiale et dans la perspective d’une nouvelle communication, en 2012, de la Commission européenne relative aux territoires ultramarins, le renforcement de la coopération régionale des Outre-mer dans leur espace respectif constitue non seulement une évidence, mais aussi un formidable défi. Quatre enjeux essentiels doivent être particulièrement pris en compte :

yyle développement économique, social, sanitaire, éducatif, environnemental (notamment la biodiversité) des collectivités ultramarines dans leur bassin de vie respectif ;

yyla promotion et la sauvegarde des identités culturelles ultramarines ;

yyune meilleure organisation et maîtrise des flux migratoires dans les différentes zones concernées ;

yyune contribution au rayonnement de l’Union européenne (UE) et au développement de la francophonie.

 

Les principales préconisations du Conseil économique, social et environnemental (CESE) pour renforcer la coopération régionale des Outre-mer s’articulent autour des quatre axes suivants :

1 L’ensemble du projet d’avis a été adopté au scrutin public par 189 voix et 5 abstentions (voir le résultat du scrutin en annexe).

Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 5

Assurer les fondamentaux préalables

Le renforcement de la coopération régionale des Outre-mer passe d’abord par la mise en place ou l’amélioration des outils et des dispositifs qui existent. Il passe également par l’instauration d’infrastructures et de relations « diplomatiques » qui ne relèvent pas nécessairement directement de la coopération, mais en sont des éléments de contexte indispensables à sa mise en oeuvre efficace. Dans ce cadre, le CESE :

yyrecommande que l’ensemble des territoires ultramarins, sans exception, puissent nommer des agents les représentant pour servir notamment dans les ambassades de France implantées dans les pays appartenant à leur zone géographique ;

yyrecommande que le ministère des Affaires étrangères et européennes fasse preuve d’un engagement diplomatique à la hauteur des enjeux pour mettre en exergue les points de blocage de toute nature qui freinent ou ralentissent l’adhésion des Outre-mer aux organismes internationaux de coopération ;

yyrecommande que la Délégation pour l’action extérieure des collectivités territoriales (DAECT) se mobilise davantage envers les territoires ultramarins ne serait-ce qu’en les informant mieux et que la Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD), qui comprend des représentants ultramarins, organise parfois ses travaux sur les articulations possibles entre coopération décentralisée et coopération régionale mises en oeuvre par les Outre-mer ;

yyrecommande que la politique d’assouplissement en matière de visas soit poursuivie et adaptée pour l’entrée des étrangers sur le territoire des collectivités françaises ultramarines afin de favoriser les échanges économiques, touristiques et ceux liés à la formation ;

yyestime que les moyens financiers utilisés pour la coopération régionale des territoires ultramarins doivent être confortés et qu’une augmentation ne manquerait pas d’avoir des effets importants considérant le faible niveau de développement des pays destinataires des projets ;

yypréconise que le Groupe de travail de haut niveau (GTHN) pour les Comores et Mayotte se réunisse de nouveau et reprenne ses activités ;

yyestime donc importante la dotation en infrastructures de désenclavement, notamment routières, portuaires, aéroportuaires et numériques des territoires ultramarins et des pays ou territoires qui les entourent. Mais cette dotation doit être pensée et mise en oeuvre régionalement et être accompagnée d’initiatives politiques fortes visant à adapter plutôt qu’à ajouter des obstacles de toute nature avec les pays de leur immédiat voisinage. Les cahiers des charges de ces projets doivent prendre en compte toute atteinte à l’environnement et maîtriser les contraintes environnementales en référence aux indicateurs de l’Union européenne, en prévoyant notamment des mesures d’atténuation et de compensation.

6 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Refonder la gouvernance de la coopération régionale

Le renforcement de la coopération régionale des Outre-mer nécessite de mieux coordonner et former ses différents acteurs. Il suppose également de mieux connaître et répertorier les actions de coopération menées. Dans ce cadre, le CESE :

yypréconise, afin d’améliorer la coordination entre les différents acteurs de la coopération régionale intervenant dans la zone géographique des territoires ultramarins, d’une part l’organisation annuelle, pour chacune des zones géographiques (Caraïbe, Amazonie-Plateau-des-Guyanes, Océan Indien, Atlantique nord et Océanie), d’une conférence de coopération régionale élargie à l’ensemble des acteurs impliqués, y compris les partenaires sociaux et les organisations non gouvernementales à l’instar des Conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (CESER). D’autre part, une conférence permanente de la coopération régionale pourrait se réunir régulièrement au sein de chaque zone géographique. Cette conférence, présidée par l’ambassadeur délégué à la coopération régionale, comprendrait les principaux acteurs locaux de la coopération régionale : l’État, les collectivités territoriales et la société civile ;

yypréconise la création sur Internet, d’un atlas de la coopération pour chacun des pays et territoires appartenant à la zone de coopération régionale des territoires ultramarins. Cet atlas aurait pour objectif a minima de répertorier les projets de coopération menés par l’UE, les collectivités territoriales, l’Agence française de développement (AFD), etc. ;

yyestime que les commissions mixtes, qui permettent d’avoir une vue d’ensemble, devraient être développées et systématisées et que les collectivités ultramarines devraient y avoir un vrai rôle institutionnel et non y être invitées comme simples participants ;

yypréconise que les personnes en charge de la coopération régionale dans les territoires ultramarins devraient bénéficier de formations spécifiques définies en partenariat notamment avec le ministère des Affaires étrangères et européennes ;

yyconsidère l’implication des acteurs de la société civile comme un gage de réussite des projets de coopération régionale.

 

Cibler en priorité les projets répondant aux intérêts réciproques

Le renforcement de la coopération régionale des Outre-mer passe par une meilleure définition et une hiérarchisation de ses objectifs afin d’améliorer notamment son efficacité. Dans ce cadre, le CESE :

yypréconise que les priorités de la coopération régionale des Outre-mer soient les suivantes :favoriser le développement économique, social et environnemental ;

participer à la préservation des biens publics mondiaux ;

promouvoir l’enseignement, la formation et la recherche ;

 

Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 7

 

yypréconise que la diplomatie française, dans le cadre des échanges franco-brésiliens et franco-surinamais, attire l’attention des parlements de ces pays sur l’importance d’accélérer la ratification des conventions et accords de coopération en matière de police et de justice afin de conforter la coopération régionale ;

yyconsidère que le renforcement des relations des Outre-mer avec les pays de leur environnement géographique doit passer par la création d’un dispositif scolaire et universitaire selon le modèle d’ERASMUSdans les territoires ultramarins ;

yypropose que la place et le rôle des territoires ultramarins dans la stratégie de coopération de la France soient mieux pris en compte et confortés.

 

Pour une nouvelle politique européenne de grand voisinage basée sur le développement humain

La « cohésion territoriale » est aujourd’hui une des trois composantes de la politique de cohésion de l’Union européenne, aux côtés de celles économique et sociale. Mais l’Union européenne n’en a pas encore tiré toutes les conséquences pour les Outre-mer. Aussi, le CESE :

préconise la mise en place par la Commission européenne d’une véritable politique de grand voisinage dans chacune des zones où se trouvent les territoires ultramarins ;

préconise la création d’un Groupement européen de coopération territoriale (GECT) ultrapériphérique pour fédérer les acteurs locaux et les pays tiers voisins et promouvoir l’émergence de projets ;

souhaite que soient mises en oeuvre rapidement les mesures concrètes d’amélioration des synergies entre le Fonds européen de développement (FED) et le Fonds européen de développement régional (FEDER), mesures préconisées par le groupe de travail opérationnel FED/FEDER piloté par la Direction générale (DG) « Politique régionale » de la Commission européenne. Ces mesures devraient être débattues au sein de l’Union européenne afin d’aboutir à des positions communes dans le cadre de la nouvelle programmation financière 2014-2020 ;

considère que les moyens financiers consacrés à la coopération régionale des territoires ultramarins et financés à partir du FEDet du FEDER doivent être augmentés dans le contexte du prochain cadre financier pluriannuel 2014-2020 ;

propose la création d’un fonds « miroir » consistant à mettre à la disposition des États tiers un montant équivalent à celui alloué au titre de la coopération régionale aux RUP et aux PTOM pour que ces pays puissent cofinancer des projets communs. Ce fonds « miroir » pourrait être financé à partir du FED ;

est favorable, pour les programmes Interreg, notamment celui de la Caraïbe, à l’instauration d’une présidence tournante des Comités de décision, entre les différentes régions concernées de Guadeloupe, Guyane et Martinique même si la Guadeloupe en reste l’Autorité de gestion.

8 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

 

préconise que les études d’impact des futurs accords commerciaux de l’UEprennent en compte les conséquences de ces accords sur les Régions ultrapériphériques (RUP) et les Pays et territoires d’Outre-mer (PTOM) du fait de leur proximité géographique avec les pays tiers concernés. Il souhaite donc que parmi les termes de référence soit explicitement indiquée la consultation des parties prenantes dans les RUP et les PTOM. Le CESEestime également primordial d’être attentif aux mesures d’accompagnement qui sont proposées par l’étude d’impact et d’être vigilant sur la composition des Comités de suivi mis en place à la suite de tous les accords de libre-échange y compris les Accords de partenariat économique (APE). La société civile des RUP et des PTOM pourrait avoir un statut d’observateur au sein de ces Comités de suivi. Enfin, il demande que des évaluations des effets des APEsoient effectuées.

 

** *Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 9

 

Avis

Introduction

 

Depuis au moins une décennie, les Outre-mer coopèrent de manière plus structurelle avec les pays et territoires de leur zone géographique respective autour de projets relevant des domaines économique, social, sanitaire, culturel, éducatif, environnemental… De plus, la volonté récente de promouvoir leur développement endogène a replacé dans l’actualité, si cela était nécessaire, l’intérêt de renforcer leur coopération régionale. En effet, des projets participant au développement endogène peuvent susciter des projets de coopération régionale et vice versa.

Au niveau européen, au cours des cinq dernières années, le règlement général des fonds structurels, ainsi que l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, ont considérablement renforcé l’importance de la coopération régionale. Ainsi, le cadre financier 2007-2013 a fait de l’objectif « coopération territoriale » l’un des trois piliers de la politique de cohésion de l’Union européenne (UE), succédant à l’initiative communautaire INTERREG. Par la suite, la « cohésion territoriale » est devenue, dans l’article 174 du traité, l’une des trois composantes de la politique de cohésion, aux côtés de celles économique et sociale. Cet article établit fermement cet objectif comme l’une des priorités principales de l’Union européenne.

La « coopération territoriale » vise en grande partie à supprimer les obstacles physiques, administratifs, réglementaires et à atténuer « l’effet frontière » existant entre les territoires, pour leur permettre de répondre ensemble à leurs défis communs, qu’ils soient territoriaux (services, infrastructures, urbanisme et aménagement du territoire), globaux (mondialisation, changement climatique), économiques ou sociétaux. Elle recèle un gisement de compétitivité encore insuffisamment exploité et participe à l’union sans cesse plus étroite entre les peuples.

Dans ce contexte, les Outre-mer possèdent une valeur ajoutée en termes de coopération avec les pays et territoires tiers voisins en raison de leur expérience et de leurs spécificités qui devraient faire d’eux des catalyseurs de développement dans leur zone géographique respective et des frontières actives de l’Europe. Le renforcement de l’insertion régionale dans leur espace respectif constitue non seulement une évidence, mais aussi un éternel défi. Dans le contexte actuel de crise mondiale, une stratégie d’insertion régionale qui favorise la création d’un espace de coopération renforcée d’échanges économique, commercial, culturel, social, de recherche, de service, pourrait contribuer fortement à améliorer la diversification et l’internationalisation de leurs économies, en créant des emplois stables et de qualité. Toutefois, malgré l’existence de ce potentiel et bien que les objectifs soient partagés de tous, il existe de graves obstacles qui rendent difficile l’utilisation de ces ressources et capacités. Malgré des priorités convergentes de part et d’autre de la frontière, et nonobstant tous les efforts déployés par toutes les parties impliquées, l’expérience montre que les Outre-mer peinent à atteindre leurs objectifs dans ce domaine d’une façon satisfaisante et cohérente pour le bien-être et la prospérité générale des populations locales.

L’objectif de cet avis est de mettre en exergue les aspects incontournables de la coopération régionale des territoires ultramarins et de suggérer un ensemble de propositions concrètes pour la renforcer.10 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Enjeux et horizons de la coopération régionale

Un concept à clarifier

En matière d’action extérieure, le nouveau souffle donné à l’article 73 de la Constitution dont relèvent les régions d’Outre-mer (ROM) ainsi que l’affirmation identitaire confirmée par l’article 74 pour les collectivités d’Outre-mer (COM) et l’article 77 pour la Nouvelle-Calédonie, permettent aux collectivités ultramarines de disposer d’outils juridiques à la fois communs à l’ensemble des collectivités territoriales et spécifiques, afin de pouvoir mettre en oeuvre des actions de coopération régionale. Ces actions peuvent concerner les domaines économique, social, sanitaire, culturel, environnemental, etc. et sont mises en oeuvre en partenariat avec une ou des entités étrangères.

Ces actions de coopération régionale peuvent donc relever de dispositions concernant la coopération décentralisée, reconnues essentiellement par la loi d’orientation n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République. La coopération décentralisée désigne la coopération entre les collectivités locales, dont les collectivités locales d’Outre-mer, avec des entités locales ou territoriales d’États étrangers ou encore avec des autorités locales étrangères. La coopération décentralisée n’est pas nécessairement régionale. Elle peut en effet concerner deux instances n’appartenant pas à la même aire géographique. Cette coopération est suivie par le ministère des Affaires étrangères et européennes.

Les actions de coopération régionale relèvent également de dispositions concernant la coopération régionale déconcentrée, dispositions mises en place par la loi d’orientation pour l’Outre-mer n° 2000-1207 du 13 décembre 2000 ou encore de dispositions relevant des lois spécifiques dans le cas des collectivités d’Outre-mer. La coopération régionale déconcentrée a un contenu particulier par rapport aux autres modes de coopération ouverts aux collectivités territoriales. Elle permet, sous conditions, une collaboration des entités infranationales ultramarines directement avec des États, des territoires ou des organismes intergouvernementaux de leur environnement régional. Ceux-ci sont essentiellement composés d’États aux autorités locales inexistantes ou parfois difficilement discernables. C’est donc dans le domaine des compétences internationales que l’insertion de la ROM dans son environnement régional doit être envisagée.

Enfin, pour mémoire, la coopération internationale désigne le dialogue, les relations entre des États souverains sans que le champ géographique de cette coopération soit limité, ni que les domaines ou les compétences soient définis a priori. Cette coopération est mise en oeuvre par le ministère des Affaires étrangères et européennes.

On peut donc observer une gradation de la coopération régionale qui se traduirait hiérarchiquement par l’exercice d’une coopération régionale interétatique, d’une coopération régionale déconcentrée et d’une coopération régionale décentralisée.Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 11

Les zones d’influence de la coopération

Même s’il est actuellement difficile pour chaque territoire ultramarin de définir la région optimale au sein de laquelle il devrait déployer sa stratégie de coopération régionale, une brève description des grands blocs régionaux auxquels ils appartiennent apparaît comme une étape indispensable. Au sein de ces blocs régionaux, les territoires ultramarins présentent un produit intérieur brut (PIB) par habitant et un indicateur de développement humain (IDH) plutôt favorables par rapport à ceux des territoires voisins et apparaissent comme des pôles de stabilité politique, économique, monétaire, etc.

L’espace Caraïbe constitue la zone potentielle de coopération de la Guadeloupe, de la Martinique, de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy. Cet espace est un ensemble formé de 38 pays et territoires de plus de 5,2 millions de km². La population s’élève à près de 250 millions d’habitants, soit environ 4 % de la population mondiale. On observera avec intérêt la stratégie de la région Martinique, stratégie d’ouverture d’un espace économique de la mer des Caraïbes vers le Plateau des Guyanes, qui s’est concrétisée par le déplacement récent en janvier 2012, d’une délégation régionale accompagnée de chefs d’entreprises dans l’État brésilien du Pará.

La Guyane occupe une place particulière. À la différence des autres départements français d’Outre-mer qui sont des îles, elle se situe au nord-est du continent sud-américain. C’est d’ailleurs le seul territoire du continent sud-américain où il existe une présence de la France et de l’Union européenne. Elle s’intègre, en effet, dans le Plateau des Guyanes qui s’étend du sud du Venezuela au nord-est du Brésil.

L’Océan Indien est la zone d’influence de La Réunion, de Mayotte et des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF). C’est le plus petit des trois océans, mais il compte deux milliards d’habitants et est pourvu d’importantes ressources naturelles et halieutiques. La France apparaît comme la grande puissance du lac francophone situé à l’ouest de l’Océan Indien. Il existe une attente des pays participant à cet espace francophone.

L’Océanie comprend 16 pays indépendants et 15 territoires liés à des États. L’anglais, le français et le portugais y sont les principales langues parlées. Au sein de ce vaste ensemble, éloigné de tous les grands centres économiques et politiques du monde, se trouvent la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna.

Enfin, l’environnement géographique de Saint-Pierre-et-Miquelon est très différent de celui des autres collectivités territoriales ultramarines : il cantonne ce territoire à des relations bilatérales avec le Canada et quatre de ses provinces côtières : la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, Terre-neuve-et-Labrador et Québec.

Les enjeux essentiels

La coopération régionale mise en oeuvre par les territoires ultramarins a pour objectif de répondre à des enjeux essentiels : lors de son audition devant les membres de la délégation à l’Outre-mer, le 12 juillet 2011, M. Vincent Bouvier, délégué général à l’Outre-mer, a insisté sur la nécessité de tenir compte de ces enjeux.12 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Le premier enjeu est le développement économique, social, sanitaire, éducatif, environnemental (notamment la biodiversité) des collectivités ultramarines dans leur bassin de vie respectif. Cet enjeu doit être mis en oeuvre dans le cadre du développement endogène qui vise à développer la production locale mais également le commerce extérieur avec les États et territoires voisins des Outre-mer. Dans cette perspective, doivent être développés et valorisés les spécificités et les atouts dont ils peuvent disposer face à leurs voisins : la jeunesse de la population et son niveau de formation, les richesses culturelles, les pôles d’excellence reconnus dans certains domaines (les structures hospitalières, les universités, les instituts de recherche, le savoir-faire en matière d’infrastructure, etc.).

Le second enjeu est la promotion et la sauvegarde des identités culturelles ultramarines. Au regard de ce second enjeu, les collectivités ultramarines doivent rappeler et mettre en valeur leurs identités culturelles communes dans les relations avec leurs voisins, qu’il s’agisse par exemple de l’identité amazonienne pour la Guyane ou de l’identité mélanésienne pour la Nouvelle-Calédonie. Cette identité culturelle commune doit être un des moteurs des échanges des Outre-mer qui peut permettre aussi de favoriser la connaissance mutuelle des spécificités de chacun des territoires.

Le troisième enjeu vise à mieux organiser et à maîtriser les flux migratoires dans les différentes zones concernées. La coopération en matière de flux migratoires entre les collectivités ultramarines et leurs voisins est prise en étau entre des objectifs qui peuvent apparaître antinomiques. D’une part, il est nécessaire d’assouplir les régimes de visas pour faciliter les échanges en matière de tourisme mais également de voyages d’affaires, comme cela a été réclamé lors des États généraux de l’Outre-mer (EGOM). Des mesures en ce sens ont été prises mais leurs effets sur le terrain n’ont pas encore complètement convaincu. D’autre part, la lutte contre l’immigration clandestine doit être menée, en particulier à Mayotte, à Saint-Martin et en Guyane (y compris l’orpaillage clandestin), en mettant en place une coopération spécifique sur ce sujet difficile. Les autres types de coopération, économique, sociale, culturelle, peuvent également faciliter la maîtrise de ces flux migratoires.

Enfin, le quatrième et dernier enjeu est de contribuer au rayonnement de l’Union européenne et au développement de la francophonie. Cet enjeu repose en particulier sur la participation des Outre-mer et de la France aux nombreuses organisations régionales (Commission de l’Océan Indien, Commission du Pacifique Sud, etc.).

Comment renforcer la coopération régionale

Assurer les fondamentaux préalables

Le renforcement de la coopération régionale des Outre-mer passe d’abord par la mise en place ou l’amélioration des outils et des dispositifs qui existent. Il passe également par l’instauration d’infrastructures et de relations « diplomatiques » qui ne relèvent pas nécessairement directement de la coopération, mais en sont des éléments de contexte indispensables à sa mise en oeuvre efficace.Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 13

Mettre en oeuvre les moyens juridiques, financiers et institutionnels disponibles

Les territoires ultramarins disposent de compétences en matière de coopération régionale plus ou moins élargies selon leur statut. Ces compétences font de façon récurrente, l’objet de débats quant à l’opportunité de les étendre davantage, notamment dans leurs domaines de compétences propres. Deux points focalisent les critiques, en particulier pour les régions d’Outre-mer (ROM) : d’une part, l’obligation d’inscrire cette coopération dans un champ strictement régional et d’autre part, d’avoir à solliciter l’autorisation ou le mandat de l’État pour entamer, mener et conclure un accord.

Le cadre juridique et institutionnel actuel est habituellement justifié comme étant le point d’équilibre entre la libre administration des collectivités ultramarines dans un État unitaire et les compétences de souveraineté de l’État français. Mais avant même d’engager ce débat, encore faut-il s’assurer que les moyens existants sont promus et mis en oeuvre.

Concrétiser la représentation des Outre-mer au sein du réseau diplomatique français

 

Les territoires ultramarins ont désormais la possibilité d’affecter des agents dans le réseau diplomatique français. Des conventions pour définir les compétences exactes de ces représentants des territoires ultramarins sont en cours d’élaboration entre le ministère de l’Outre-mer et le ministère des Affaires étrangères et européennes. Ce dispositif mérite d’être mis en oeuvre, systématisé et coordonné.

Ainsi, comme l’a indiqué l’ambassadeur délégué à la coopération régionale dans la zone de l’Océan Indien, M. Leyssène, une convention est en cours de négociation entre le ministère des Affaires étrangères et européennes et le Conseil régional de La Réunion pour que des agents de cette collectivité puissent être mis à disposition des ambassades des pays de la zone de coopération afin de promouvoir les intérêts de La Réunion et d’être à l’écoute des marchés locaux et des appels d’offre par exemple2.

La Nouvelle-Calédonie va être dotée de délégués au sein des ambassades de France des États insulaires de sa région proche. Une convention en ce sens a été signée le jeudi 26 janvier 2012 entre le ministère de la coopération, le ministère de l’Outre-mer et le gouvernement de Nouvelle-Calédonie. Elle prévoit que les ambassades de France en Australie, Nouvelle-Zélande, Vanuatu, Fidji et Papouasie-Nouvelle-Guinée recevraient ces délégués à partir de la fin 2013. En 2012, une formation d’un an devrait leur être dispensée à l’Institut d’étude politique de Paris et à l’Institut diplomatique et consulaire du ministère des Affaires étrangères et européennes. De même, un fonctionnaire territorial représentant de la Région Guyane devrait être également nommé au Suriname.

Le CESE recommande que l’ensemble des territoires ultramarins, sans exception, puissent nommer des agents les représentant pour servir notamment dans les ambassades de France implantées dans les pays appartenant à leur zone géographique.

2 Audition de M. Philippe Leyssène, ambassadeur délégué à la coopération régionale dans la zone de l’Océan Indien, devant la délégation à l’Outre-mer du CESE, le 10 mai 2011. 14 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

 

Favoriser la représentation des Outre-mer au sein des organisations régionales

 

La représentation des Outre-mer dans les organisations régionales3 doit favoriser leur ancrage dans leur environnement. Toutefois être membre des organisations régionales est important, mais y être présent et participer à leurs travaux est tout aussi primordial. Cette présence implique que des agents des services de l’État et des collectivités territoriales aient pour mission de préparer et de participer aux travaux de ces organisations régionales afin que les intérêts du territoire ultramarin qu’ils représentent soient pris en compte aux différents stades de l’élaboration des projets.

Ainsi la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française sont membres associés du Forum des îles du Pacifique (FIP) depuis 2006. Il est nécessaire de soutenir les démarches de ces deux collectivités en vue d’obtenir le statut de membre permanent de cette instance, démarches entamées lors des sommets du FIP de Port-Vila en août 2010 et d’Auckland en septembre 2011. De même, Wallis-et-Futuna bénéficient du statut d’observateur au sein du FIP et leur demande d’accès au statut de membre associé doit également être appuyée.

Concernant Saint-Pierre-et-Miquelon, étant donné que la collectivité n’a pas reçu les mêmes compétences que la Polynésie française ou la Nouvelle-Calédonie en matière de relations extérieures, l’archipel reste très dépendant dans ses relations avec le Canada. Puisque l’essentiel des accords intéressant cette collectivité a trait à la pêche et aux hydrocarbures, il est difficilement compréhensible qu’elle n’ait pas reçu la capacité de négocier et signer des arrangements administratifs d’application des traités conclus.

Pour le moment, les ROM n’ont pas encore la possibilité d’être membres à part entière, mais peuvent, avec l’accord des autorités de la République, être membres associés de certains organismes régionaux ou observateurs auprès de ceux-ci. Ainsi, le 26 janvier 2012, la Haute Autorité de l’Organisation des États de la Caraïbe Orientale (OECO) a donné son accord de principe aux demandes formulées par la Guadeloupe et la Martinique d’adhérer à cette organisation régionale en qualité de membre associé. La Guadeloupe, la Guyane4 et la Martinique ont décidé, le 5 décembre 2011, lors de la 3e conférence des présidents des régions françaises d’Amérique, en accord avec le gouvernement français, de formaliser leur demande d’adhésion à la CARICOM et au CARIFORUM. Deux autres collectivités territoriales sont concernées : Saint-Barthélemy et Saint-Martin. La Guyane souhaite également adhérer à l’Organisation du traité de coopération amazonien (OTCA) et à l’Union des Nations Sud Américaines (UNASUR). La Guyane, la Guadeloupe et la Martinique ont également décidé d’adopter une démarche concertée pour occuper les postes électifs aux comités spéciaux de l’Association des États de la Caraïbe (AEC) dont ils sont membres associés avec désormais Saint-Barthélemy et Saint-Martin par l’intermédiaire de la France. Enfin, le rehaussement de la représentation française au sein du Marché commun d’Afrique orientale et australe (COMESA) et de l’Association des États riverains de l’Océan Indien (IORARC) devrait avoir des conséquences positives pour La Réunion et Mayotte.

3 Les principales organisations régionales de la zone Caraïbe-Plateau des Guyanes sont la communauté caribéenne du marché commun (CARICOM), le CARIFORUM, l’Organisation des États de la Caraïbe orientale (OECO) et l’Association des États de la Caraïbe (AEC). Les principales organisations régionales de la zone Océan Indien sont la Commission de l’Océan Indien (COI), le Marché commun d’Afrique orientale et australe (COMESA), l’Association des États riverains de l’Océan Indien (ARC) et la communauté de développement de l’Afrique australe (SADC). Les principales organisations de la zone Océanie sont la Communauté du Pacifique (CPS) et le Forum des îles du Pacifique (FIP).

4 La demande de la Guyane a été transmise au ministre des Affaires étrangères et européennes, le 9 janvier 2012.Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 15

L’État doit se montrer de manière plus déterminée un allié des collectivités ultramarines, qui exercent une attraction sur les pays environnants grâce à leur statut politique (souvent perçu comme une curiosité ou une « anomalie coloniale »), économique et social de région d’Europe dans leur océan respectif. Il ne faut en effet pas perdre de vue que, dans les organisations internationales de ce type, les négociations et les arbitrages peuvent être d’une extrême complexité et exiger une expertise juridique et financière pointue, au point qu’il puisse être utile de bénéficier de l’assistance juridique de la France dans ces négociations internationales, sur des sujets déterminés, dans le cadre d’un partenariat intelligemment négocié.

Le CESE recommande que le ministère des Affaires étrangères et européennes fasse preuve d’un engagement diplomatique à la hauteur des enjeux pour mettre en exergue les points de blocage de toute nature qui freinent ou ralentissent l’adhésion des Outre-mer aux organismes internationaux de coopération.

Le CESE propose qu’une étude ministérielle soit initiée pour faire un état des lieux exhaustif au niveau de tous les organismes de coopération internationale impliquant les Outre-mer et formuler des propositions concrètes en vue de faciliter la poursuite de la démarche d’insertion des Outre-mer dans leur environnement géographique.

Utiliser davantage les moyens offerts par la coopération décentralisée

 

Comme l’a indiqué M. Antoine Joly, délégué pour l’action extérieure des collectivités territoriales, lors de son audition devant les membres de la délégation à l’Outre-mer, le 26 avril 2011, la Délégation pour l’action extérieure des collectivités territoriales (DAECT) ne fait guère de distinction dans les actions qu’elle mène entre les collectivités, qu’elles soient métropolitaines ou ultramarines, étant donné notamment l’existence de dispositifs spécifiques de coopération pour les Outre-mer. Toutefois ce regard indifférencié semble avoir pour conséquence une faible implication des territoires ultramarins dans la coopération décentralisée et l’utilisation des moyens financiers, techniques, etc. qu’elle offre. Ainsi M. Antoine Joly a souligné que les collectivités territoriales ultramarines déposaient peu de dossiers répondant aux appels d’offre triennaux ou annuels pilotés par la DAECT. Cette faible implication des Outre-mer peut en partie s’expliquer par un manque d’information notamment à l’attention des communes.

Le CESE préconise que la Délégation pour l’action extérieure des collectivités territoriales (DAECT) se mobilise davantage envers les territoires ultramarins ne serait-ce qu’en les informant mieux et que la Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD), qui comprend des représentants ultramarins, organise parfois ses travaux sur les articulations possibles entre coopération décentralisée et coopération régionale mise en oeuvre par les Outre-mer.

Poursuivre la politique d’assouplissement en matière de visas

 

Avec les arrêtés de juillet 2011 relatifs à l’assouplissement des visas et documents exigés pour l’entrée des étrangers sur le territoire des collectivités françaises d’Outre-mer, ce sont près de 200 mesures de simplification qui ont été prises. Le Pacifique est devenu, à deux exceptions près, une zone libre de visas court-séjour pour se rendre en Nouvelle-Calédonie, 16 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

à Wallis-et-Futuna ou en Polynésie française. Cette mesure a été appréciée lors des Jeux du Pacifique, à Nouméa, à l’été 2011. Des initiatives ont été également lancées pour encourager le tourisme, telles que la délivrance de visas à l’arrivée à La Réunion, dans le cadre du concept des « Îles Vanille ».

Le CESE souhaite que la politique d’assouplissement en matière de visas soit poursuivie et adaptée pour l’entrée des étrangers sur le territoire des collectivités françaises ultramarines afin de favoriser les échanges économiques, touristiques et ceux liés à la formation.

Augmenter les moyens financiers consacrés à la coopération régionale

 

Même s’il est pour l’instant difficile d’établir un bilan exhaustif de l’ensemble des moyens financiers consacrés à la coopération régionale dans les zones d’influence des territoires ultramarins, il est possible d’observer que certains fonds comme le Fonds Pacifique ou les fonds à disposition des ambassades pour ce type de projet ont tendance à fondre pour atteindre un étiage où la participation de la France risque d’apparaître bien symbolique. Le CESE estime que les moyens financiers utilisés pour la coopération régionale des territoires ultramarins doivent être confortés et qu’une augmentation ne manquerait pas d’avoir des effets importants considérant le faible niveau de développement des pays destinataires des projets.

Dépasser les contentieux territoriaux existants

La France a des contentieux territoriaux avec certains pays partenaires des territoires ultramarins dans le cadre de la coopération régionale. Dans l’Océan Indien, elle a un contentieux avec Maurice au sujet de Tromelin, avec les Comores au sujet de Mayotte et avec Madagascar au sujet des îles Éparses dans le canal du Mozambique. Dans la Caraïbe, entre Antigua-Barbuda et Saint-Barthélemy, un contentieux porte sur la délimitation maritime. Entre Saint-Martin (France) et Sint Maarten (Antilles néerlandaises), la question du point d’arrivée de la frontière qui conditionne la limite des eaux territoriales reste toujours en suspens. Enfin, sur le Plateau des Guyanes, entre le Suriname et la Guyane, les discussions portent sur les limites des eaux territoriales et du plateau continental.

Cependant, des avancées importantes ont déjà été constatées. Un accord avec Maurice sur l’île Tromelin a ainsi été signé il y a plus d’un an et est en cours de ratification parlementaire. Cet accord-cadre original pour la coopération économique, scientifique et environnementale de Tromelin est accompagné de trois conventions techniques.

Il faudrait que des solutions soient également trouvées avec les Comores et Madagascar lorsque cette dernière aura retrouvé une stabilité politique. Il faudrait ainsi que le nouveau statut de Mayotte lui permette d’améliorer ses relations avec les États de la région. Créé en septembre 2007, à l’initiative des Présidents comorien et français, le Groupe de travail de haut niveau (GTHN), mis en place en 2008, a pour mission de favoriser le développement économique conjoint de Mayotte et des Comores, d’encourager la coopération régionale dans divers domaines (police, justice, douanes, santé, éducation, sécurité civile, culture et sport) et d’améliorer la circulation des biens et des personnes entre les Comores et Mayotte5. En 2009, le GTHNa été mis en sommeil, en raison d’un contexte politique peu favorable aux Comores et de l’émotion suscitée à Moroni par la consultation mahoraise du 29 mars 2009.

5 Rapport annuel 2011 sur Mayotte de l’IEDOM. Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 17

Depuis, il n’a pas repris véritablement son activité. Le CESE préconise que le Groupe de travail de haut niveau (GTHN) pour les Comores et Mayotte se réunisse de nouveau et reprenne ses activités.

Ces contentieux territoriaux maintiennent une tension diffuse et ne facilitent pas le bon voisinage et les échanges. Notre assemblée regrette que les contentieux territoriaux avec les pays et territoires partenaires des Outre-mer ne soient pas aplanis afin de permettre une meilleure coopération régionale.

Disposer des bonnes infrastructures de désenclavement

Les Outre-mer entendent promouvoir l’attractivité de leur territoire en soulignant l’avantage comparatif que constituent leur localisation géographique et leur proximité physique avec d’autres continents que le continent européen. L’éloignement par rapport au reste du territoire de l’UE, les surcoûts qui y sont associés et, dans le cas des archipels, les coûts induits par la double insularité, représentent la barrière la plus importante à la libre circulation des biens et des personnes en provenance des régions ultrapériphériques (RUP). Dès lors, la « fiction » du marché unique et la « réalité » de la discontinuité territoriale paraissent difficiles à combiner6.

La mise en oeuvre d’une coopération régionale efficace contribuant à la réduction du déficit d’accessibilité des territoires ultramarins, par rapport à leur environnement géographique respectif, suppose de disposer sur place ou dans les pays et territoires partenaires, de bonnes infrastructures routières, portuaires, aéroportuaires et numériques (à des coûts raisonnables et en préservant la biodiversité), indispensables à cette coopération. Des conditions minimales doivent être réunies. Dans l’Océan Indien par exemple, espace de grande circulation de marchandises et de personnes, Mayotte et La Réunion ainsi que les pays et territoires qui les entourent ne pourront capter une part croissante de ces flux de richesse que s’ils parviennent à se mettre d’accord ensemble sur une vision commune d’un espace aérien et maritime partagé et doté des bonnes infrastructures. Cette stratégie serait au service de chaque île et devrait éviter une concurrence stérile et coûteuse en termes d’équipements. Ce diagnostic est valable pour l’ensemble des zones de coopération régionale où se situent les territoires ultramarins. Ces grands projets doivent être planifiés à l’échelle régionale, soutenus et envisagés positivement et non craintivement car ils participent du désenclavement des territoires et de leur développement possible. De même, comme le soulignait, M. Jean-Rémy Cauquil7, commissaire au développement endogène dans les Antilles, dans le domaine du transport, l’ouverture de la troisième écluse de Panama devrait dévier une partie du trafic de conteneurs de Suez vers le Panama et irriguer les Caraïbes. Pour capter une partie de ce surplus d’activités, les projets portuaires en Martinique et en Guadeloupe doivent être soutenus ainsi que les projets logistiques afférents. La réforme des ports d’Outre-mer, qui vient d’être votée, peut permettre d’atteindre cet objectif. Enfin, ces grands projets ne doivent pas être évalués uniquement du point de vue du surplus d’immigration illégale qu’ils pourraient engendrer. Ainsi, la construction d’un pont sur l’Oyapock entre la Guyane et le Brésil participe du désenclavement de la Guyane et devrait favoriser les échanges. De même, les projets envisagés entre le Suriname et la Guyane doivent être encouragés.

6 « Les régions ultrapériphériques européennes dans le marché unique : le rayonnement de l’UE dans le monde », rapport au membre de la Commission européenne Michel Barnier présenté par Pedro Solbes Mira.

7 Audition du mardi 24 mai 2011 devant les membres de la délégation à l’Outre-mer du CESE.18 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Le CESE estime donc importante la dotation en infrastructures de désenclavement, notamment routières, portuaires, aéroportuaires et numériques des territoires ultramarins et des pays ou territoires qui les entourent. Mais cette dotation doit être pensée et mise en oeuvre régionalement et être accompagnée d’initiatives politiques fortes visant à adapter plutôt qu’à ajouter des obstacles de toute nature avec les pays de leur immédiat voisinage. Les cahiers des charges de ces projets doivent prendre en compte toute atteinte à l’environnement et maîtriser les contraintes environnementales en référence aux indicateurs de l’Union européenne, en prévoyant notamment des mesures d’atténuation et de compensation.

Refonder la gouvernance de la coopération régionale

Mieux coordonner l’action des différents acteurs de la coopération intervenant dans la zone géographique des territoires ultramarins

Il s’agit certes d’un problème de méthode mais il est important. En effet, la liste des acteurs de la coopération intervenant dans la zone géographique régionale des Outre-mer est impressionnante : Ministère de l’Outre-mer, Ministère des Affaires étrangères et européennes, ministère de l’Intérieur, Commission européenne, représentations de l’État dans les territoires ultramarins, ambassadeurs de France dans les États voisins, ambassadeurs de la coopération régionale, commissaires au développement endogène, Délégation pour l’action extérieure des collectivités territoriales, représentants et services des collectivités ultramarines, différents organismes de coopération régionale, etc.

Cette abondance d’intervenants peut amoindrir l’efficacité des actions de coopération régionale, car elle peut être source d’actions redondantes ou contradictoires. Il est donc primordial de renforcer la coordination en matière de coopération régionale. Dans cet esprit, deux rendez-vous permettent désormais aux ambassadeurs situés dans les États frontaliers de pleinement intégrer les intérêts des Outre-mer. Une conférence régionale des ambassadeurs est organisée une fois par an dans chacune des zones concernées. Par ailleurs, lorsque tous les ambassadeurs de France à l’étranger se réunissent en conférence nationale des ambassadeurs à Paris, reçus à l’Élysée et au Quai d’Orsay, la ministre de l’Outre-mer organise à cette occasion une réunion spécifique au ministère pour réunir les ambassadeurs des États voisins des territoires ultramarins afin d’échanger sur des sujets communs et d’assurer une fonction de coordination et de synthèse. Le CESEsoutient favorablement l’existence de ces deux rendez-vous qu’il juge indispensables. Mais il faudrait aller plus loin dans la coordination, ne serait-ce qu’au niveau de chacune des zones géographiques. On peut s’interroger par exemple sur les raisons pour lesquelles les ambassadeurs à la coopération régionale ne sont pas résidents dans leur zone respective. De même, comme déjà constaté auparavant, les territoires ultramarins ne sont pas les seuls à faire de la coopération avec les pays qui composent leur environnement. Par le biais de la coopération décentralisée par exemple, des collectivités métropolitaines peuvent effectuer de la coopération avec ces États. Au niveau de l’UE, des actions en faveur de la coopération régionale peuvent être menées notamment avec des pays d’Afrique Caraïbe Pacifique (ACP).Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 19

Afin d’améliorer la coordination entre les différents acteurs de la coopération régionale intervenant dans la zone géographique des territoires ultramarins, le CESE recommande d’une part l’organisation annuelle, pour chacune des zones géographiques (Caraïbe, Amazonie-Plateau-des-Guyanes, Océan Indien, Atlantique nord et Océanie), d’une conférence de coopération régionale élargie à l’ensemble des acteurs impliqués, y compris les partenaires sociaux et les organisations non gouvernementales à l’instar des CESER. D’autre part, une conférence permanente de la coopération régionale pourrait se réunir régulièrement au sein de chaque zone géographique. Cette conférence, présidée par l’ambassadeur délégué à la coopération régionale, comprendrait les principaux acteurs locaux de la coopération régionale : l’État, les collectivités territoriales et la société civile.

Mieux connaître et répertorier les actions de coopération menées dans un pays ou un territoire

La coopération est une réalité dans tous les domaines. Ainsi, dans chacun des pays ou territoires voisins d’un territoire ultramarin sont en oeuvre à un instant T, une multitude d’actions relevant de la coopération. Ces actions peuvent être menées par l’Union européenne via le Fonds européen de développement (FED), notamment si le pays est un pays ACP ; par des collectivités territoriales, dans le cadre de leur action extérieure ; par le territoire ultramarin concerné sur ses propres financements, le Fonds de coopération régionale, le Fonds européen de développement régional (FEDER), etc. ; par l’Agence française de développement (AFD) ou encore des Organisations non gouvernementales (ONG), etc.

Toutes ces actions de coopération partent d’un élan de générosité louable mais si on examine la situation du pays ou territoire bénéficiaire, la cohérence des projets, leur pérennité, etc. ne sont pas toujours assurées. En effet, pour l’instant, l’ensemble des actions de coopération régionale menées à un moment donné n’est pas nécessairement répertorié et connu de tous les acteurs de la zone. C’est préjudiciable en termes d’efficacité car cette ignorance empêche par exemple de possibles et fructueuses collaborations ou des échanges de bonnes pratiques. Il est donc impossible actuellement de faire le bilan complet et l’évaluation des actions de coopérations dans un cadre régional. Or cette cartographie est indispensable pour mieux se repérer dans la multiplicité des actions mises en oeuvre. Il s’agit in fine de savoir qui fait quoi et comment dans chaque pays ou État voisin d’un territoire ultramarin ainsi que la somme totale des financements mobilisés. Cette connaissance des actions engagées permettrait ensuite de mieux les prioriser, harmoniser et coordonner afin d’en améliorer l’efficacité à coût constant et de capitaliser sur les expériences.

La Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD), instance de dialogue au plus haut niveau entre l’État et les collectivités territoriales dans leurs actions internationales, est tenue au titre de la loi, d’établir et de tenir à jour un état de la coopération décentralisée menée par les collectivités territoriales. L’atlas français de la coopération décentralisée recense ainsi sur Internet, de manière cartographique, toutes les actions internationales menées par les collectivités territoriales françaises dans le cadre de la coopération décentralisée. Près de 12 000 projets de coopération décentralisée menés par plus de 4 700 collectivités territoriales françaises avec 9 800 collectivités de 138 pays y sont répertoriés à ce jour. Cet atlas contribue à une meilleure connaissance de l’action décentralisée. Il constitue un instrument au service de la cohérence et de l’efficacité des 20 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

actions extérieures des collectivités territoriales. Grâce à cet atlas, il est donc possible de connaître dans chacun des pays ou territoire appartenant à la zone géographique des territoires ultramarins, les actions de coopération décentralisée menées.

Le CESE recommande la création sur Internet, d’un atlas de la coopération pour chacun des pays et territoire appartenant à la zone de coopération régionale des territoires ultramarins. Cet atlas aurait pour objectif a minima de répertorier les projets de coopération menés par l’UE, les collectivités territoriales, l’AFD, etc.

Développer et systématiser les commissions mixtes transfrontalières

Les commissions mixtes transfrontalières réunissent la France et les États voisins pour faire le point annuellement sur l’ensemble des grands sujets de coopération. Ainsi la commission mixte entre le Brésil et la Guyane se réunit régulièrement pour traiter de différents sujets internationaux et transfrontaliers. Saint-Martin a récemment vu la mise en place d’une commission mixte transfrontalière qui favorisera la mise en cohérence des projets développés de part et d’autre de l’île. Enfin, la commission mixte entre La Réunion et Madagascar devrait être relancée dès que possible.

Le CESE estime que les commissions mixtes, qui permettent d’avoir une vue d’ensemble, devraient être développées et systématisées et que les collectivités ultramarines devraient y avoir un vrai rôle institutionnel et non y être invitées comme simples participants.

Mieux former les personnes en charge de la coopération régionale

Comme le rappelaient MM. Leyssène et Diémert lors de leurs auditions devant les membres de la délégation à l’Outre-mer, la diplomatie est un métier. En matière de coopération régionale, il faut en particulier connaître quelques règles, maîtriser certaines procédures, adopter des postures. Un effort de professionnalisation de l’action de coopération régionale doit être poursuivi, notamment vis-à-vis des agents des collectivités locales qui auraient parfois tendance à se comporter, à leur corps défendant, dans les États étrangers comme s’ils traitaient avec une autre collectivité alors que souvent, ils ont pour interlocuteurs des ministres d’États indépendants ou leurs représentants8.

La formation des personnes en charge de la coopération régionale passe aussi obligatoirement par une bonne maîtrise des langues étrangères parlées dans leur zone géographique et en particulier de l’anglais. Cet effort à mettre en oeuvre pour maîtriser les langues étrangères des zones de coopération (anglais, espagnol, portugais, etc.) n’est pas contradictoire avec la promotion de la francophonie. Ces deux objectifs doivent s’articuler.

La maîtrise du système politique et juridique des pays partenaires de la coopération est également cruciale pour que les collectivités ultramarines puissent jouer un rôle de premier plan dans les organisations internationales. Des formations continues et initiales devraient être opportunément développées dans ce domaine si l’on souhaite réellement que les

8 Audition de M. Philippe Leyssène, ambassadeur, délégué à la coopération régionale dans la zone de l’Océan Indien, devant les membres de la délégation à l’Outre-mer du CESE, le 10 mai 2011 et audition de M. Stéphane Diémert, ambassadeur, délégué à la coopération régionale dans la zone Antilles-Guyane le 27 septembre 2011. Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 21

acteurs locaux arrivent progressivement à être imprégnés des « codes diplomatiques » qui permettent de réussir les projets d’accord et de partenariat au titre de la coopération.

Le CESE préconise que les personnes en charge de la coopération régionale dans les territoires ultramarins devraient bénéficier de formations spécifiques définies en partenariat notamment avec le ministère des Affaires étrangères et européennes.

Mieux impliquer la société civile, condition de réussite des projets

La question du rôle de la société civile, tout autant actrice dans la coopération régionale que destinataire de projets publics, est cruciale. La question est de savoir comment inclure dans les processus de coopération régionale les champs de la vie non organisés par la sphère publique, c’est-à-dire les entreprises, les universités, les partenaires sociaux, les acteurs de la culture, le monde sportif, associatif et autres ONG, notamment environnementales, etc. En effet, l’implication de la société civile permet d’apporter des solutions concrètes à toutes les problématiques rencontrées, que ce soit en matière de droit social, fiscal, d’emploi, de logement, de transports, de soins, de l’environnement…

L’État et les élus locaux devraient susciter cette implication pour concevoir une démarche participative qui fonde une gouvernance transfrontalière nouvelle. Les Conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (CESER) pourraient jouer un rôle de facilitateur avec les sociétés civiles voisines. De même, la mise en place d’un dialogue social territorial transfrontalier, dont les modalités restent à préciser, conforterait cette démarche. Les médias pourraient jouer un rôle important dans la construction de cette identité interrégionale et dans l’émergence d’un sentiment d’appartenance au territoire. Certes, ils permettent de faire connaître les projets et les politiques transfrontalières locales, mais ils intéressent tout particulièrement le citoyen lorsqu’ils évoquent des initiatives qui ont un impact direct sur sa vie de tous les jours. D’ailleurs, les expériences menées montrent que l’intérêt de la population pour les questions transfrontalières est une réalité et qu’elle est renforcée lorsqu’une expression libre et des échanges directs entre les citoyens de l’espace transfrontalier sont organisés. Les initiatives dans ce domaine restent isolées et disparates. Cela pose la question d’une « mission de service public audiovisuel » dans l’espace interrégional qui permettrait de développer et de financer des projets de médias pérennes.

La société civile recouvre une diversité d’acteurs (associations, entreprises, partenaires sociaux, universités…) aux capacités techniques et financières très disparates. Le montage et le suivi de démarches transfrontalières requièrent des compétences bien spécifiques et des ressources financières complémentaires à celles utilisées pour les activités traditionnelles de ces structures. Dans ce contexte, il est indispensable que les institutions appuient ces actions de coopération régionale en créant des dispositifs financiers dédiés.

Le CESE considère l’implication des acteurs de la société civile comme un gage de réussite des projets de coopération régionale.22 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Cibler en priorité les projets répondant aux intérêts réciproques

Hiérarchiser et mieux définir les objectifs de la coopération régionale

Les objectifs de la coopération régionale des territoires ultramarins doivent être mieux définis et hiérarchisés. Le CESE recommande que les priorités de la coopération régionale des Outre-mer soient les suivantes :

yyfavoriser le développement économique, social et environnemental ;

yyparticiper à la préservation des biens publics mondiaux ;

yypromouvoir l’enseignement, la formation et la recherche.

 

Favoriser un progrès économique, social et environnemental partagé

 

La coopération régionale doit favoriser l’intégration économique des territoires ultramarins dans leur zone de référence et dans les secteurs où ils possèdent une « plus-value » tels que le spatial, la santé, les énergies renouvelables9. Ainsi, après des années de réticences, la Nouvelle-Calédonie a exprimé le souhait d’adhérer au traité Pacific Island Countries Trade Agreement (PICTA) qui est un accord de libre échange entre les pays insulaires océaniens en faveur du développement des échanges dans la zone. Cette adhésion ouvrirait les marchés insulaires océaniens aux entreprises néocalédoniennes. De même, la Guyane, dans le cadre de l’ouverture du pont sur l’Oyapock, cherche à créer les conditions pour développer les échanges économiques avec les États du Plateau amazonien dont l’État fédéré brésilien transfrontalier de l’Amapá. Ainsi la chambre de commerce et d’industrie de Guyane a ouvert une antenne à l’Amapá et une autre au Suriname.

Lors de son audition devant les membres de la délégation à l’Outre-mer, M. Bertrand Coûteaux a souligné que les projets à même de dynamiser le développement endogène des départements et régions d’Outre-mer pouvaient initier des projets de coopération régionale et vice-versa. Ainsi, il a expliqué que le projet de développer à Mayotte une aquaculture responsable et compétitive au niveau mondial devrait stimuler le développement de l’économie locale mais pourrait également être à l’origine d’une vraie dynamique régionale autour de l’aquaculture incluant les pays et territoires riverains comme Madagascar, le Mozambique, Maurice, les Seychelles et La Réunion. La coopération régionale pourrait en particulier porter sur la mutualisation de certains équipements (antenne de l’IFREMER à Mayotte, etc.) et de problématiques communes (recherche, savoir-faire, production d’aliments, etc.). De même un autre projet de coopération agricole possible serait d’envisager de produire à Madagascar et au Mozambique toutes les matières agricoles dont La Réunion

9 Dans l’avis du CESEde juillet 2011 sur les énergies renouvelables, il est d’ailleurs mentionné que le développement des filières renouvelables dans l’Outre-mer doit constituer aussi une « vitrine » de notre recherche et de ses applications industrielles. A l’heure où s’élabore une nouvelle approche des coopérations entre l’Union et l’ensemble des territoires ultramarins, le CESEconsidère qu’une occasion s’offre d’intégrer systématiquement un volet « énergies renouvelables » dans les futures coopérations communautaires. Cf. l’avis du CESEintitulé « Les énergies renouvelables Outre-mer : laboratoire pour notre avenir », rapporté par M. Patrick Galenon, au nom de la section des activités économiques (juillet 2011).Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 23

a besoin pour alimenter sa filière d’élevage sans tomber dans les travers de la captation ou de la spoliation des terres. Ce projet de coopération agricole dynamiserait le développement économique des pays partenaires et consoliderait le développement endogène de La Réunion en valorisant son savoir-faire agricole, en sécurisant l’approvisionnement de sa filière d’élevage et en offrant un débouché intéressant aux jeunes techniciens agricoles Réunionnais qui ont des difficultés d’accès à la terre pour travailler.

Participer à la préservation des biens publics mondiaux

 

La maîtrise du changement climatique, de l’érosion de la biodiversité, de la propagation des maladies contagieuses et l’amélioration de la stabilité financière, entre autres, constituent aujourd’hui des enjeux collectifs. Ces enjeux ne sont aujourd’hui pas correctement pris en charge ni par les marchés, parce que leurs bénéfices ne sont pas « appropriables », ni par les États, car leurs bénéfices ne peuvent être circonscrits dans leurs frontières10. La coopération régionale mise en oeuvre par les territoires ultramarins devrait s’inscrire prioritairement dans la préservation de ces biens publics mondiaux.

L’Agence française de développement (AFD) et le Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM) ont déjà financé des projets visant la sauvegarde de ces biens publics mondiaux. C’est le cas notamment du projet Coral Reef InitiativeS for the Pacific (CRISP) de promotion des récifs coralliens en Océanie. Ce projet, porté par la France et préparé par l’AFDdepuis 2002, avait pour ambition de définir et mettre en oeuvre des stratégies et des projets visant à préserver la biodiversité des récifs coralliens et à valoriser les services économiques et environnementaux qu’ils apportent. Le CRISP a donc été conçu comme un vecteur d’intégration des États du Pacifique et des collectivités françaises d’Outre-mer. Après six années de mise en oeuvre, le bilan fait état d’un nombre impressionnant de résultats très concrets avec notamment la création d’une cinquantaine d’aires marines protégées dans 11 pays, couvrant une superficie de plus de 400 000 km2. Ce projet a permis le financement d’environ 80 projets dans 17 pays de la zone Pacifique, et la participation d’une quarantaine de partenaires (organismes de recherche et ONGlocaux), pour un montant global de l’ordre de 15 millions d’euros11. Le CESE recommande que ce type de coopération puisse être étendu à tout projet concernant la biodiversité des territoires ultramarins, lorsque cela s’avère pertinent.

Les maladies émergentes représentent par exemple une menace croissante, en lien notamment avec la mondialisation des échanges et le changement climatique. Les États insulaires de l’Océan Indien sont particulièrement sensibles à ce risque, comme l’a montré l’épisode récent du chikungunya. La vulnérabilité économique de ces États très dépendants du tourisme plaide pour une organisation régionale de l’alerte et de la réponse aux épidémies. En 2007, les Comores, la France (La Réunion), Madagascar, Maurice et les Seychelles ont ainsi mis en place le Centre de recherche et de veille sur les maladies émergentes dans l’Océan Indien (CRVOI) dans le cadre de la Commission de l’Océan Indien (COI). Le projet leur permet d’échanger l’information épidémiologique, de renforcer leurs capacités techniques et de mutualiser leurs moyens en cas d’urgence sanitaire. Le réseau ainsi créé s’appuie sur les pôles d’expertise régionaux que sont l’antenne de l’Institut de veille sanitaire de La Réunion et l’Institut Pasteur de Madagascar.

10 Ministère des Affaires étrangères et européennes, « Coopération au développement : une vision française – Stratégie 2011 », document cadre, décembre 2010.

11 Gabrié Catherine, « Six années pour la protection, la gestion et la valorisation des récifs coralliens du Pacifique – Capitalisation des résultats », rapport du CRISP, préface, p. 3, 2011. 24 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Le Suriname est confronté aux mêmes problématiques qu’en Guyane en ce qui concerne l’orpaillage clandestin. Comme le constatait l’AFDdans son plan 2008-2010, « l’exploitation clandestine et polluante des ressources forestières et minières des deux territoires constitue par ailleurs un enjeu stratégique commun pour la France et le Suriname, la protection durable de la forêt primaire, qui s’étend sur l’ensemble du Plateau des Guyanes, et de sa biodiversité n’ayant de chances de succès que si elle est conduite en partenariat ». La dégradation des eaux fluviales doit être également prise en considération. Comme en Guyane, le secteur de l’exploitation aurifère a une composante à la fois formelle et informelle. Les exploitants clandestins, sont souvent, sinon majoritairement, d’origine brésilienne. L’extrême porosité de la frontière permet une communication constante entre les deux secteurs illégaux de part et d’autre des frontières. L’approvisionnement des orpailleurs clandestins opérant sur le territoire français provient du Suriname. En janvier 2008, un accord de coopération policière entre le Suriname et la France a bien été conclu. Mais la coopération régionale est difficile, en dépit de la bonne volonté des autorités, ne serait ce que parce que le corpus juridique de réglementation au Suriname n’a qu’une lointaine parenté avec le dispositif français. De même, les moyens mis en place par la France dans le cadre de l’opération « Harpie » n’ont pas leur équivalent au Suriname. La mobilité des orpailleurs clandestins rend la surveillance trop aléatoire pour être réellement efficace. Le même constat est globalement valable pour le Brésil sur ce sujet. Un accord France-Brésil sur la lutte contre l’orpaillage clandestin signé en 2008 entre le président Sarkozy et le président Lula, a été ratifié par la France mais pas encore par le Brésil. Il en va de même de l’accord signé aussi par les deux présidents, sur la mise en synergie des forces de police et de gendarmerie entre le Brésil et la France.

Le CESE préconise que la diplomatie française, dans le cadre des échanges franco-brésiliens et franco-surinamais, attire l’attention des parlements de ces pays sur l’importance d’accélérer la ratification des conventions et accords de coopération en matière de police et de justice afin de conforter la coopération régionale.

Faire de l’enseignement, de la formation et de la recherche un point fort de la coopération régionale des Outre-mer

 

La coopération régionale en matière d’enseignement, de formation et de recherche des territoires ultramarins devrait reposer sur trois projets :

yyfavoriser la création d’un grand pôle universitaire francophone dans chaque zone géographique ;

yypoursuivre l’enrichissement de l’offre de formation dans les points forts des territoires ultramarins ;

yycréer un dispositif scolaire et universitaire selon le modèle d’ERASMUSdans les zones géographiques ultramarines.

 

Alors qu’actuellement dans la majorité des cas, les relations et les coopérations se réalisent avec la métropole et avec les pays européens, chaque territoire ultramarin devrait renforcer sa coopération dans les domaines de l’enseignement supérieur, de la recherche et de la formation professionnelle avec les pays de sa zone géographique.

Le CESE considère que le renforcement des relations des Outre-mer avec les pays de leur environnement géographique doit passer par la création d’un dispositif scolaire et universitaire selon le modèle d’ERASMUS dans les territoires ultramarins. La mise en place de ce nouveau dispositif devrait permettre d’accéder à des cursus et à des stages. Elle devrait traiter la question de l’équivalence des diplômes entre les différents systèmes d’enseignement et pourrait s’inspirer, pour la formation professionnelle, des initiatives prises en ce sens par L’Agence de l’Outre-mer pour la mobilité (LADOM) et du dispositif européen Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 25

LEONARDO DA VINCI. Cette mobilité à l’international pourrait améliorer l’attractivité des établissements d’enseignement ultramarins, promouvoir le développement de la francophonie et favoriser l’insertion des Outre-mer dans leur environnement géographique. Elle pourrait aussi améliorer les indispensables connaissances linguistiques des jeunes ultramarins qui, à la différence des métropolitains, baignent dans un espace géographique où le français est minoritaire et où la maîtrise de l’anglais, de l’espagnol ou du portugais peut se révéler un atout décisif pour s’insérer professionnellement. Cette amélioration des connaissances linguistiques des jeunes ultramarins est un enjeu primordial et devrait être soutenue par la création d’instituts de langue, de lycées internationaux ou de cours dès le primaire.

Recentrer une partie de la politique de coopération de la France sur les zones géographiques des territoires ultramarins

En décembre 2010, le ministère des Affaires étrangères et européennes a publié un document cadre sur la politique de coopération et de développement de la France. Cette publication synthétise en un même document la stratégie française de coopération, ses priorités géographiques et sectorielles, ainsi que les moyens financiers et humains que la France y consacre.

Afin de répondre au défi d’une mondialisation maîtrisée et de garantir les grands équilibres de la planète sur le long terme, la stratégie française de coopération se concentre sur quatre objectifs majeurs : favoriser une croissance durable et équitable pour les populations les plus défavorisées ; lutter contre la pauvreté et les inégalités ; préserver les biens publics mondiaux ; assurer la stabilité mondiale et l’État de droit.

Les pays appartenant aux zones de coopération des territoires ultramarins et les zones ainsi définies ne font pas partie des priorités géographiques de la coopération française. De façon plus générale, les territoires ultramarins, qu’on aime parfois présenter comme les « postes avancés de l’UE » dans le monde, n’apparaissent pas comme des relais préférentiels de la coopération française.

Tout au plus est-il indiqué que « la politique de coopération avec une région ou un pays donné peut avoir des conséquences importantes pour les collectivités ultramarines, notamment dans les domaines économiques et commerciaux, ainsi que pour les questions de sécurité et d’immigration. À cet égard, la politique de coopération veillera dans les pays proches des collectivités ultramarines à l’intégration des priorités de ces collectivités12. »

Or, comme l’a remarqué Mme Lapierre lors de son audition13, l’Agence française de développement (AFD) essaie aujourd’hui de bâtir une stratégie plus concrète de coopération régionale des territoires ultramarins à côté de ses deux stratégies existantes qui sont la stratégie internationale et la stratégie Outre-mer. En effet, l’AFDest présente à la fois dans les pays étrangers et dans les territoires ultramarins. Elle souhaite donc mieux coordonner ces différentes stratégies dans les zones géographiques des Outre-mer. Le ministère des Affaires étrangères et européennes pourrait s’inspirer de ces réflexions et de ces travaux.

12 Ministère des Affaires étrangères et européennes, « Coopération au développement : une vision française – Stratégie 2011 », document cadre, décembre 2010, p. 28.

13 Audition de Mme Odile Lapierre, directrice adjointe des Opérations à l’AFD, devant les membres de la délégation à l’Outre-mer du CESE, le 12 juillet 2011. 26 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Le CESE propose que la place et le rôle des territoires ultramarins dans la stratégie de coopération de la France soient mieux pris en compte et confortés.

Pour une nouvelle politique européenne de grand voisinage basée sur le développement humain

Mettre en place une politique de Grand voisinage dans les zones de coopération des Outre-mer

L’idée d’une politique de Grand voisinage date des années 1990. Elle est mentionnée par la Commission européenne sous l’expression de « Plan d’action pour le grand voisinage » (PAGV) et se retrouve dans différents actes, notamment les communications de la Commission dont celle de mai 2004, qui établissait une stratégie communautaire en faveur des RUP basée sur 3 axes : la réduction de leur déficit d’accessibilité (interne et externe), l’amélioration de leur compétitivité et l’intégration dans leurs espaces géographiques propres.

Cette coopération est loin d’être facile à mener et fait face à de nombreuses difficultés, notamment liées au manque de coordination entre les instruments financiers utilisés. Par ailleurs, le PAGVtel que conçu par la Commission en 2004, prévoyait de sensibiliser l’ensemble des acteurs concernés, y compris des délégations de la Commission dans les pays tiers, sur l’importance du défi auquel font face les RUP et les pays de leur zone géographique. La communication de la Commission concernant les RUP d’octobre 2008, met en avant la position géostratégique et géographique spécifique des RUP et prône la nécessité de continuer à développer le PAGVdans le futur, consciente que ladite coopération pour les RUP ne constitue pas une question de volonté mais de nécessité. Toutefois, la concrétisation de l’idée de Grand voisinage PAGVpour mieux intégrer les RUP dans leur espace socio-économique et culturel passe notamment par la coordination nécessaire des fonds FED-FEDER, l’amélioration des échanges d’expériences et la dynamisation des plateformes d’expression entre les différents espaces de coopération. Elle suppose également la mise en oeuvre de solutions réglementaires et financières simples et originales, qui s’adaptent aux espaces et types de coopération, une implication réelle de tous les acteurs concernés en application d’une gouvernance multi niveaux (États membres, et en particulier les États membres comprenant des RUP, États ACP, Commission, RUP) et une meilleure coordination entre eux, sous le parrainage actif de l’UE, notamment de la Commission qui pourrait jouer le rôle de « facilitateur ». Une implication accrue signifie également plus d’information, de formation, de promotion, d’appropriation et de visibilité.

En conclusion, aujourd’hui, que ce soit dans les zones Caraïbes, Amazonie, Océan indien et Océanie, l’Union européenne ne conduit pas de véritables politiques régionales de développement puisque les moyens considérables qu’elle met en oeuvre sont surtout définis non pas par une vision stratégique et géographique mais par le statut juridique des bénéficiaires (RUP, PTOM, pays ACP, pays tiers, etc.) et chacun avec ses calendriers, ses procédures, ses interlocuteurs, etc. Le CESE recommande donc la mise en place par la Commission européenne d’une véritable politique de grand voisinage dans chacune des zones où se trouvent les territoires ultramarins. Cette politique de grand voisinage Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 27

pourrait notamment prendre appui sur la recommandation n° 17 du rapport de M. Solbes, rapport intitulé « Les régions ultrapériphériques européennes dans le marché unique : le rayonnement de l’UE dans le monde ». Cette proposition veut « impliquer davantage les RUP dans la définition et l’établissement de plans régionaux de voisinage adaptés aux réalités des espaces géographiques concernés. Les RUP devraient notamment prendre part au processus d’identification des adaptations réglementaires à apporter à leur contexte géographique pour leur permettre de développer leurs échanges avec les pays tiers. Pour ce faire, une instance de coordination regroupant les acteurs politiques de la coopération, y compris les institutions européennes, devrait être installée dans chaque zone géographique, sur le modèle du Programme opérationnel de coopération territoriale (POCT) de La Réunion, afin de faire émerger des projets au niveau de chacune des zones. »

Créer un GECTultrapériphérique pour fédérer les acteurs et promouvoir l’émergence de projets

Un règlement communautaire du 5 juillet 2006 a créé un outil juridique facilitant la coopération territoriale : le Groupement européen de coopération territoriale (GECT). Le GECT, organisme ayant la personnalité morale de droit public et l’autonomie financière, constitue un instrument unique de gouvernance territoriale.

L’expérience des GECTdéjà créés ou en cours de création montre que cet instrument fonctionne de manière satisfaisante. Il a répondu aux besoins, pour les autorités régionales et locales, de coopération structurée en termes financiers, de statuts juridiques et de gouvernance multi-niveaux – et cela au-delà même des attentes du législateur européen.

Néanmoins, dans les territoires ultramarins, le point le plus bloquant pour sa mise en place réside dans le fait que les GECTne peuvent être créés, en droit français, qu’avec les collectivités territoriales, les groupements de collectivités territoriales et les organismes de droit public des États membres de l’Union européenne ainsi qu’avec les États membres de l’Union européenne ou les États frontaliers membres du Conseil de l’Europe. En d’autres termes, il est dommage que le GECTqui est tout de même une victoire pour la coopération régionale des collectivités territoriales, reste pour l’instant un outil de coopération créé pour l’Europe géographique à l’exclusion de l’Europe ultrapériphérique. Une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au GECTest en cours de discussion14. Cette proposition suggère notamment l’ajout d’un article 3 bis favorisant l’adhésion de pays tiers et la constitution d’un GECTcomprenant des membres issus d’un seul État membre et d’un pays tiers. Ces modifications vont indéniablement dans le bon sens.

Le CESE préconise la création d’un Groupement européen de coopération territoriale (GECT) ultrapériphérique pour fédérer les acteurs locaux et les pays tiers voisins et promouvoir l’émergence de projets.

14 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1082/2006 du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006 relatif à un Groupement européen de coopération territoriale (GECT) en ce qui concerne la clarification, la simplification et l’amélioration de la constitution et de la mise en oeuvre de groupements de ce type (COM(2011) – 610 final). 28 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Apporter des réponses à la problématique FED/FEDER

La stratégie mise en oeuvre jusqu’à présent s’avère inefficace étant donné que les efforts humains et techniques dédiés à une articulation de ces instruments financiers se sont révélés largement disproportionnés par rapport aux résultats obtenus.

Un groupe de travail opérationnel FED/FEDER, piloté par la DG« Politique régionale », a identifié trois mesures concrètes qui permettraient d’améliorer les synergies entre les pays ACP, les RUP et les PTOM :

multiplier les rencontres sur le terrain entre les autorités de gestion des Programmes opérationnels de coopération territoriale, les ordonnateurs du FEDet les délégations de l’UEconcernées comme le Comité de concertation régionale à La Réunion ou le Comité de concertation FED/FEDER entre le Cap Vert et le programme Madère-Açores-Canaries ;

identifier au cours de ces rencontres les projets concrets compatibles avec les Programmes indicatifs régionaux (FED) et les Programmes opérationnels de coopération territoriale (FEDER) ;

lister ces projets compatibles FED/FEDER comme par exemple le plan d’action Réunion/Commission de l’Océan Indien et suivre leur évolution au cours des rencontres entre les directions concernées de la Commission européenne (Politique régionale et Développement et coopération).

 

Le CESE souhaite que soient mises en oeuvre rapidement les mesures concrètes d’amélioration des synergies entre le FED et le FEDER, mesures préconisées par le groupe de travail opérationnel FED/FEDER piloté par la DG « Politique régionale » de la Commission européenne. Ces mesures devraient être débattues au sein de l’Union européenne afin d’aboutir à des positions communes dans le cadre de la nouvelle programmation financière 2014-2020.

Le CESE considère que les moyens financiers consacrés à la coopération régionale des territoires ultramarins et financés à partir du FED et du FEDER doivent être augmentés dans le contexte du prochain cadre financier pluriannuel 2014-2020.

Le CESE considère que le principe de concertation dans chaque zone de coopération entre l’État, les territoires ultramarins concernés et les pays tiers est primordial et devrait être énoncé au stade des textes législatifs (FEDER et FED), ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

En outre, le CESE propose d’augmenter la possibilité d’investir des crédits FEDER dans un pays tiers non plus sur la base d’un plafond de 10 %, mais en allant plus loin, jusqu’à 40-50 % pour faciliter la concrétisation de projets qui impliquent un tel niveau de dépenses dans un pays partenaire de la coopération ultramarine.

Le CESE suggère également d’impliquer davantage toutes les ressources financières d’investissement nationales, régionales et internationales comme par exemple l’AFD, l’Organisation des Nations unies (ONU), la Banque américaine de développement, etc.Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 29

Instaurer un fonds « miroir » en faveur des partenaires étrangers

La France et ses collectivités ultramarines ont tout à gagner en dynamisant la coopération, notamment par des facilités d’accès à certaines sources de financement ouvertes aux pays étrangers voisins des Outre-mer, moyens financiers qu’ils ne possèdent de toute façon pas aujourd’hui pour être des interlocuteurs crédibles dans les relations internationales d’immédiat voisinage. Les pays concernés sont dans leur grande majorité des ACP, pays en règle générale pauvres qui ne veulent pas consacrer une partie des crédits FEDpour la coopération. Ils considèrent en effet que ces crédits sont des aides allouées au budget national pour le financement de projets nationaux. Par conséquent, les programmes opérationnels (PO) de coopération sont construits à partir des crédits du FEDER (75-85 %) auxquels s’ajoute la contrepartie nationale (régions) obligatoire. Du côté des pays partenaires, les crédits sont indicatifs et donc dans la plupart des cas inexistants. Il est difficile dans ces conditions de cofinancer des projets d’intérêt commun à moins que ceux-ci ne se fassent qu’aux dépens des crédits des collectivités ultramarines, ce qui est souvent le cas (câble haut débit dans les Caraïbes, antenne satellitaire à La Réunion avec usage, entre autres, pour la prévention des risques naturels).

Dans cette perspective, le CESE propose la création d’un fonds « miroir » consistant à mettre à la disposition des États tiers un montant équivalent à celui alloué au titre de la coopération régionale aux RUP et aux PTOM pour que ces pays puissent cofinancer des projets communs. Ce fonds « miroir » pourrait être financé à partir du FED.

Le CESE propose également de reformuler l’article 21 du règlement FEDER afin d’y inclure la notion de bénéfice partagé entre RUP et pays tiers de l’UE.

Pour la future coopération 2014-2020, le CESE est favorable à la création :

d’un programme opérationnel (PO) transfrontalier entre les deux parties de Saint-Martin ;

d’un PO transfrontalier entre Mayotte (RUP) et les Comores (ACP) ;

d’un PO transnational pour l’Océan Indien incluant Mayotte ;

d’un PO Amazonie divisé en deux : transfontalier Guyane-Brésil-Suriname et transnational Guyane-Guyana.

 

Enfin, pour les programmes Interreg, notamment celui de la Caraïbe, le CESE est favorable à l’instauration d’une présidence tournante des comités de décision, entre les différentes régions concernées de Guadeloupe, Guyane et Martinique même si la Guadeloupe en reste l’Autorité de gestion.

Prévoir des études d’impact dans les négociations commerciales tenant compte des territoires ultramarins

Les accords négociés par l’Union européenne modifient ou suppriment les droits tarifaires à l’importation sur le marché de l’UEpour certains produits de base des pays tiers, que les RUP exportent elles-mêmes en grandes quantités (bananes, sucre, riz, viande, fruits et légumes). Ces accords commerciaux ont donc un impact sur la capacité concurrentielle 30 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

sur le marché de l’UEdes producteurs des RUP appartenant aux mêmes aires géographiques que ces pays tiers15. Cette concurrence à l’exportation concerne principalement le sucre et les bananes, mais également de nombreuses autres productions locales qui pourraient être encouragées par le biais de la diversification.

L’existence de l’article 349 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) justifie la pratique consistant à assortir les propositions d’accords de libre-échange d’études d’impact pour l’agriculture et l’industrie européennes. En conséquence, le CESE recommande que les études d’impact des futurs accords commerciaux de l’UE prennent en compte les conséquences de ces accords sur les RUP et les PTOM du fait de leur proximité géographique avec les pays tiers concernés. Elle souhaite donc que parmi les termes de référence soumis au consultant qui va réaliser l’étude d’impact développement durable, soit explicitement indiquée la consultation des parties prenantes dans les RUP et les PTOM y compris les CESER. Le CESE estime également primordial d’être attentif aux mesures d’accompagnement qui sont proposées par l’étude d’impact et d’être vigilant sur la composition des Comités de suivi mis en place à la suite de tous les accords de libre-échange y compris les APE. La société civile des RUP et des PTOM pourrait avoir un statut d’observateur au sein de ces Comités de suivi. Enfin, il demande que des évaluations des effets des APE soient effectuées. Il convient de veiller que les accords de partenariat économique (APE) ne pénalisent pas structurellement les économies des Outre-mer afin que leur intégration dans leur environnement régional soit facilitée en considérant l’article 349 comme une véritable clause de sauvegarde.

15 « Les régions ultrapériphériques européennes dans le marché unique : le rayonnement de l’UE dans le monde », rapport au membre de la Commission européenne Michel Barnier présenté par Pedro Solbes Mira. Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 31

Conclusion

La recherche d’une meilleure insertion des territoires ultramarins dans leur environnement régional est souvent identifiée comme un des principaux leviers de leur croissance durable, c’est-à-dire d’une croissance qui serait riche en emplois tout en restant compétitive, basée sur une utilisation responsable des ressources et la préservation de la biodiversité. Cette meilleure insertion doit également avoir des effets économiques et sociaux bénéfiques aux territoires appartenant à cet espace régional dans une démarche de développement humain.

Au terme de cet avis, dont l’objectif n’était pas de dresser un tableau exhaustif de la situation de chacun des territoires dans leur environnement régional du point de vue économique, social, sanitaire, environnemental, culturel, etc., il ressort un ensemble de recommandations pour renforcer la coopération régionale des Outre-mer.

D’ores et déjà, les Outre-mer doivent aussi penser à s’inscrire dans le cadre de la stratégie UE2020. Le renforcement de la coopération régionale est un moyen indispensable pour y parvenir au regard des trois priorités fixées les 17 et 18 juin 2010 par les vingt-sept chefs d’États et de gouvernement de l’Union européenne lors de l’adoption officielle de la stratégie économique UE2020.

En effet, cette nouvelle stratégie devrait insister sur l’ambition de réaliser une croissance intelligente (économie de la connaissance), durable (économie sobre en carbone et préservant les ressources naturelles), et inclusive (emploi élevé et cohésion sociale). Toutes ces initiatives doivent être menées au niveau régional, national et européen. Mais le volet de la coopération régionale devra être pris en considération par les autorités nationales, régionales et locales qui auront à dynamiser des partenariats forts en associant étroitement les parlementaires, ainsi que les partenaires sociaux et les représentants de la société civile, tant pour l’élaboration des projets que pour leur mise en oeuvre.32 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Déclaration des groupes

Agriculture

Le groupe a salué le rapporteur pour l’immense travail effectué et a insisté sur le bon déroulement des travaux : l’excellent niveau des auditions et la richesse des débats ont permis de présenter des textes d’une très grande qualité. Le rapport deviendra, certainement un document de référence sur la thématique de la coopération régionale.

D’une manière générale, le groupe de l’agriculture approuve les préconisations et a souhaité mettre l’accent sur quelques aspects qui nous concernent plus particulièrement.

Le groupe rejoint la volonté du rapporteur de favoriser un progrès économique et social partagé. C’est un objectif que nous poursuivons également. L’activité agricole est très structurante en Outre-mer, tant d’un point de vue économique, géographique, social et environnemental. Par ailleurs, il est important, pour toute l’économie d’un territoire, de produire local et de consommer local.

L’exemple de la Réunion et les projets de coopération agricole sont particulièrement mis en avant. En la matière, la plus grande prudence s’impose. Et pas uniquement à la Réunion. En effet, les conditions de concurrence doivent être examinées avec soin afin de véritablement mettre en place une stratégie gagnant-gagnant et non pas de mettre en danger les filières agricoles existantes. Actuellement, dans les Outre-mer, les actions prioritaires de nos organisations sont de valoriser les productions locales et surtout de les organiser et de les structurer.

Le groupe de l’agriculture soutient tout particulièrement la dernière proposition de l’avis : il faut prévoir des études d’impact dans les négociations commerciales de l’Union européenne tenant compte des territoires ultramarins. Et il faut surtout veiller à ce que les accords de partenariat économique ne pénalisent pas structurellement les économies des Outre-mer. Ce sont là des aspects essentiels pour les filières agricoles de ces territoires. Il faut, nous semble-t-il, agir à la fois pour le renforcement des économies d’Outre-mer et pour la coopération régionale. L’un n’ira pas sans l’autre.

Le groupe de l’agriculture a voté en faveur de l’avis.

Artisanat

Pour le groupe de l’artisanat, cet avis présente l’intérêt de souligner tous les enjeux que porte la coopération des territoires ultramarins avec les pays de leurs zones géographiques respectives.

Alors que les Outre-mer souffrent de leurs contraintes d’éloignement de la métropole, avec laquelle se concentre la majorité de leurs échanges, ils peuvent tirer de nombreux bénéfices d’une stratégie d’insertion régionale favorisant un espace de coopération renforcée, d’échanges économiques, commerciaux et culturels, avec les pays tiers de leur immédiat voisinage.Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 33

Cette coopération régionale devrait, en effet, favoriser la croissance endogène des territoires ultramarins, à travers l’ouverture de nouveaux débouchés pour leur production locale, une diversification de leur économie, le développement de leur compétitivité, ou encore la valorisation de secteurs dans lesquels ils possèdent une plus-value spécifique comme les énergies renouvelables.

Le groupe de l’artisanat ne peut donc que partager l’objectif de renforcer et de promouvoir, au profit des Outre-mer, ce levier de la coopération régionale qui représente également un potentiel de retombées positives, tant pour l’ensemble de notre territoire national, que pour l’Union européenne.

L’avis formule une série de propositions visant d’une part, à lever les obstacles qui freinent une telle coopération et d’autre part, à mobiliser les outils et les financements adaptés.

Le groupe de l’artisanat adhère globalement à ces préconisations.

Parmi celles-ci, il retient, en particulier, la nécessité de cibler les projets répondant aux intérêts réciproques des territoires ultramarins et des pays étrangers de leur zone géographique, en recherchant la complémentarité et une logique « gagnant-gagnant ».

Le groupe de l’artisanat retient également le besoin de mieux coordonner les actions de coopération régionale, que celles-ci soient menées par l’Union européenne, les États ou les collectivités territoriales ; il y a là, en effet, un moyen de renforcer leur efficacité, comme d’optimiser les investissements qui y sont consacrés.

L’artisanat, à travers son réseau d’organisations professionnelles et de chambres de métiers, s’implique fortement en faveur de la consolidation et de la promotion de l’artisanat ultramarin, dont le rôle est essentiel à la vitalité et au développement endogène de l’Outre-mer.

Cette mobilisation s’exprime par divers partenariats, mais aussi par des programmes d’accompagnement des créateurs et de soutien au développement des entreprises, favorisant notamment l’accès aux financements ou encore la formation des artisans, de leurs salariés ou de futurs apprentis.

S’associant aux objectifs portés par cet avis, le groupe de l’artisanat l’a voté.

Associations

Alors que la crise économique et sociale est dans toutes les têtes, la compétition entre les territoires d’Outre-mer et leur voisinage aurait pu être une tentation. Le groupe des associations se satisfait qu’à l’inverse, un avis du Conseil économique, social et environnemental insiste sur le nécessaire renforcement de la coopération régionale des Outre-mer.

Le groupe des associations approuve globalement les orientations de l’avis présenté. Il souhaite revenir plus particulièrement sur trois d’entre elles.

Tout d’abord, la gouvernance des relations entre les Outre-mer et les pays voisins doit être respectueuse d’un certain principe de subsidiarité. Il n’est pas normal qu’aujourd’hui les relations bilatérales ou multilatérales de la France avec des pays voisins des départements, régions ou collectivités d’Outre-mer excluent ces derniers. En effet, ce sont bien sur ces territoires que les effets des échanges et accords de coopération seront les plus significatifs. 34 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Le processus d’association des Outre-mer dans ces relations de coopération – au-delà d’un statut purement consultatif – doit donc être clairement dynamisé.

Le groupe des associations souhaite également insister sur un aspect auquel il est particulièrement attentif : l’association de la société civile aux projets de coopération. L’avis met bien en lumière son apport au dynamisme des projets, dans toute la diversité de ses acteurs, de ses compétences et de ses moyens financiers et humains. Pourtant, il nous apparaît que le rôle de la société civile comme vectrice de l’appropriation par les citoyennes et les citoyens ultramarins des enjeux de cette coopération aurait pu être davantage développé.

Enfin, le groupe des associations salue la pluralité des objectifs de la coopération auxquels il s’associe. L’éducation, la santé, les pratiques culturelles ou sportives sont des instruments puissants de coopération. Des développements plus conséquents auraient sans doute pu permettre de les mettre davantage en valeur dans l’avis, comme ils le sont dans le rapport.

Le groupe des associations a voté l’avis.

CFDT

La coopération interrégionale des Outre-mer avec leur environnement immédiat constitue un nouveau levier de développement endogène et une avancée de l’Union européenne dans ce monde globalisé. C’est d’autant plus important qu’une telle coopération accompagne la croissance des échanges avec l’émergence de pôles économiques dynamiques en Amérique et en Afrique.

Travail inédit et bien documenté, le rapport étudie avec finesse les avantages d’une intensification des échanges économiques tout autant que les conditions d’une diversification des échanges dans les domaines de l’éducation, de la recherche et de la culture. C’est un bon support pour l’avis et donne une valeur ajoutée à la mise en place de la délégation à l’Outre-mer au sein du Conseil.

Cet avis équilibré atteste de la confiance dans les initiatives locales. Il conforte les responsabilités de l’échelon européen et de l’échelon national. La région – entendue comme vaste espace d’un monde multipolaire – doit devenir le véritable maître d’oeuvre de cette coopération interrégionale.

Dans l’avis, la CFDTveut insister essentiellement sur une meilleure prise en compte de l’espace régional des Outre-mer dans les programmes de cohésion sociale et territoriale de l’Union européenne. Fort justement, l’avis préconise, compte tenu de l’éloignement, la création d’une politique européenne du « Grand voisinage ». Cet avis représente aussi un apport utile pour la stratégie renouvelée des régions ultrapériphériques que la Commission européenne prévoit de soumettre au débat en 2012.

Dans la perspective d’accords commerciaux bilatéraux de l’Union européenne avec d’autres pays ou régions du monde, la question de l’adéquation de l’acquis communautaire avec d’autres systèmes socio-économiques mérite une attention particulière. L’article 349 du traité de Lisbonne autorise l’adaptation des politiques communautaires aux spécificités locales.

Les études d’impact développement durable constituent une phase préalable qui permet de mesurer les conséquences des futurs accords sur les Outre-mer. Pour la CFDT, il Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 35

faut veiller à inclure dans les études d’impact les auditions des organisations des territoires concernés et tout particulièrement les Conseils économiques sociaux et environnementaux régionaux.

Dans la mise en oeuvre de ces accords commerciaux, en premier lieu dans les Caraïbes, il est décisif que les organisations socioprofessionnelles fassent entendre leur voix au sein du comité de suivi de l’accord en tant qu’observateurs. L’enjeu est de veiller à ce que des mesures d’accompagnement préservent les intérêts des Outre-mer.

La CFDTa voté l’avis.

CGT

C’est un sujet à la fois évident et complexe qui nous réunit aujourd’hui. Le mérite est donc grand de présenter des propositions immédiatement mobilisables pour renforcer la coopération régionale des Outre-mer dans leur zone géographique : Caraïbe, Plateau des Guyanes, ouest de l’Océan indien, Océanie, régions autour de Terre-Neuve.

Dans la situation de grave crise économique et sociale que connaissent les territoires ultramarins dans leur diversité, des mouvements sociaux de grande ampleur contre la vie chère ont donné plus d’actualité encore aux propositions pour un autre mode de développement qualifié d’endogène, ouvert aux coopérations économiques régionales.

Comme l’indique le rapport, le commerce extérieur est encore tourné vers la métropole malgré l’éloignement et les relations économiques avec les pays voisins sont très faibles, fruits d’une division du travail héritée de notre passé.

Cette situation n’est pas spécifique aux régions ultrapériphériques françaises, le rapport de M Pedro Solbès Mira d’octobre 2011, intitulé les RUP européennes dans le marché unique, note que la crise a mis en évidence les faiblesses structurelles de ces économies : niveau de revenu par habitant relativement faible, poids assez important du secteur public, balances commerciales déséquilibrées, production agricole peu diversifiée, dépenses de R et Dmodestes, dépendance excessive à l’égard de certains secteurs. Pour autant, ces régions ont des atouts : laboratoire pour la recherche scientifique et médicale, pour le développement agroindustriel, pour l’adaptation au changement climatique, les énergies renouvelables, la biodiversité, l’environnement maritime. La main d’oeuvre y est qualifiée, les services publics et infrastructures présents.

L’insertion régionale de ces régions constitue un vecteur de développement dans leur bassin géographique respectif. Pour cela, il est essentiel que les politiques nationales et européennes prennent pleinement en compte les spécificités des territoires ultramarins. Cette nouvelle dynamique ne sera possible qu’avec l’association étroite des organisations syndicales de salariés, des représentants de la société civile réorientant la croissance vers une économie plus sobre en ressources naturelles, préservant la biodiversité et respectueuse des droits des salariés. Pour que les coopérations soient effectives, il ne faut pas que les accords soient exclusivement négociés à Paris ou à Bruxelles : coopérer dans la Caraïbe, c’est ouvrir aux sociétés civiles de Martinique, de Guadeloupe, par exemple, les négociations et le suivi des accords éventuels avec les îles environnantes, la Barbade, la République dominicaine, Haïti, la Jamaïque… Ainsi, l’accord de partenariat économique Cariforum/UEa institué un comité consultatif mixte qui pourrait accueillir des représentants des CESER de la région, au moins comme observateurs, comme le propose le rapport.36 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Cette exigence démocratique vaut pour les citoyens des RUP, partie intégrante de l’UEdont l’article 349 du traité de Lisbonne reconnaît la spécificité permettant un traitement différencié qui peut donc être considéré comme une clause de sauvegarde. Elle vaut aussi pour les citoyens des Pays et territoires d’Outre-mer (PTOM). Mieux impliquer la société civile est pour nous une condition de réussite des projets. Enfin, la CGTpartage les propositions de l’avis de cibler les priorités de la coopération régionale sur le développement économique et social, la préservation des biens publics mondiaux, la promotion de l’enseignement, de la formation et de la recherche.

En accord avec les organisations syndicales partenaires de la CGTdans les territoires ultramarins, notre groupe a voté cet avis.

Coopération

Alors que les territoires ultramarins sont confrontés à une double crise économique et sociale, ni l’Union européenne ni les Outre mer ne tirent aujourd’hui suffisamment parti de leur proximité avec les pays tiers et d’autres territoires voisins pour saisir les opportunités offertes par la coopération régionale.

Si cette coopération a progressé, il est nécessaire de la renforcer bien davantage, pour donner de nouveaux débouchés aux économies ultra-marines et contribuer ainsi un développement économique et social plus harmonieux. Les obstacles demeurent en effet réels pour les collectivités françaises d’Outre-mer : les barrières douanières et commerciales, la différence de niveau de vie, la faiblesse des liaisons de transport avec les voisins immédiats, parfois l’instabilité politique de l’environnement régional ou encore la nécessité d’appliquer les normes européennes, constituent autant de difficultés spécifiques que doivent surmonter ces territoires.

L’objectif est d’approfondir l’intégration politique, économique, commerciale, sociale, culturelle, éducative et environnementale des Outre-mer, au sein de leur marché régional, et de leur permettre de dynamiser ainsi leur développement endogène. Le groupe de la coopération partage l’une des lignes directrices de l’avis qui vise à favoriser l’intégration des territoires ultramarins dans des secteurs d’avenir comme l’environnement, les énergies renouvelables, la santé, le spatial et l’agriculture, pour lesquels ils disposent d’atouts compétitifs.

Dans cette perspective, les opportunités commerciales liées au développement des pays voisins vont s’intensifier au cours des prochaines années du fait de la signature des accords de partenariat économique avec l’Union européenne. Le groupe de la coopération appelle à la vigilance quant à l’impact de ces accords qui ne pourront être conclus au détriment de certains secteurs des économies ultramarines, par exemple le secteur agricole.

Pour le groupe de la coopération, l’intensification des échanges régionaux requiert l’existence d’infrastructures adéquates et la présence d’entreprises tournées vers l’international. Il faut également favoriser une meilleure intégration des collectivités au sein des organisations régionales.

La coopération régionale devrait permettre à la France et à l’Union européenne, d’impulser de nouvelles dynamiques sur des territoires porteurs situés sur l’ensemble des continents. Elle devrait aussi favoriser la constitution des Outre-mer en pôles stratégiques servant de « point d’appui régional « à l’influence française et européenne et à conforter leur responsabilités.Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 37

La coopération régionale apparaît ainsi comme une dimension incontournable du développement des Outre-mer. Le groupe de la coopération a voté en faveur de l’avis.

Entreprises

Parce que les Outre-mer sont éloignés des centres de décisions de l’hexagone, ils ont été conduits à coopérer de plus en plus avec les pays et territoires de leur zone géographique. Cependant si cette coopération s’est assez largement développée dans les domaines culturels, sportifs, éducatifs, scientifiques et sanitaires, il faut reconnaître que tel n’a pas été le cas dans le domaine économique, et que dans tous les cas, il apparaît indispensable de renforcer la coopération régionale des Outre-mer.

Un certain nombre de contraintes sont à l’origine de cette situation : physiques, administratives et réglementaires mais le contexte actuel de crise mondiale, l’existence de réelles potentialités et la nécessité de développement endogène afin de répondre aux exigences de création d’emplois stables, nous conduit aujourd’hui à insister sur le besoin urgent de lever ces obstacles.

Le rapporteur a très bien pris en compte cette nécessité et le groupe des entreprises soutient l’essentiel de ses préconisations. Toutefois, aux yeux des entreprises certaines doivent plus particulièrement être mises en avant :

yyTout d’abord, il est indispensable de mettre l’accent sur la dotation en infrastructures de désenclavement, notamment routières, portuaires, aéroportuaires et numériques des territoires ultramarins et des pays ou territoires qui les entourent, lesquelles doivent être pensées et mises en oeuvre régionalement, au plus près des besoins.

yyEnsuite, parce que la gouvernance de la coopération régionale doit être améliorée, nous appuyons les préconisations du rapporteur d’organiser annuellement une conférence de coopération régionale élargie à l’ensemble des acteurs impliqués, y compris les partenaires sociaux et les organisations non gouvernementales à l’instar des Conseils économiques sociaux et environnementaux régionaux (CESER).

yyNous soutenons également la proposition d’élaborer, dans les territoires ultramarins, un dispositif scolaire similaire au modèle Erasmus.

yyL’Europe doit aussi avoir un rôle a jouer par le biais du Fonds européen de développement en mettant en place, comme le préconise l’avis, un fonds « miroir » consistant à mettre à la disposition des États tiers un montant équivalent à celui alloué au titre de la coopération régionale aux Régions ultrapériphériques (RUP) et aux Pays et territoires d’Outre-mer (PTOM) pour qu’ils puissent cofinancer des projets communs.

 

Ces orientations sont vitales pour le développement de nos territoires Ultramarins et le texte qui est présenté aujourd’hui, prend en compte ces besoins et y apporte des réponses adaptées, c’est pourquoi le groupe des entreprises a voté favorablement cet avis.38 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Environnement et nature

Dans le contexte actuel de crise mondiale, la dynamique de coopération régionale prend un sens et un intérêt particulier, en matière d’échanges économiques, commerciaux, culturels ou sociaux mais aussi de savoir-faire. Les Outre-mer présentent à cet égard des spécificités et un potentiel fort encore peu valorisés, en raison d’obstacles de taille. Le groupe environnement et nature trouve particulièrement intéressant l’objectif de cet avis visant à suggérer des propositions de renforcement de la coopération régionale des Outre-mer, et remercie le rapporteur et la délégation avec qui les échanges ont été riches et constructifs sur le sujet.

Parmi un ensemble assez fourni de préconisations, le groupe soutient deux points en particulier :

yyl’implication des acteurs de la société civile comme gage de réussite des projets de coopération régionale. Le groupe soutient clairement l’idée que l’implication des champs non organisés de la sphère publique, dont le monde associatif, notamment environnemental, a son rôle à jouer dans l’apport de solutions concrètes dans des domaines aussi variés que la fiscalité, l’emploi, l’environnement, les soins etc. Les CESER comme facilitateurs et les institutions comme appui semblent des préalables à la concrétisation de cette participation de la société civile ;

yyla prise en compte des atteintes à l’environnement et la maîtrise des contraintes environnementales dans les cahiers des charges des projets d’infrastructures liés au désenclavement des territoires ultramarins et zones alentour, en prévoyant notamment des mesures d’atténuation et de compensation.

 

L’articulation et la complémentarité entre les trois piliers du développement durable est justement bien rappelée dans les enjeux définis dans la partie constat de l’avis. Le groupe environnement et nature remercie le rapporteur pour avoir intégré un amendement visant à mettre en cohérence ces enjeux avec les priorités de la coopération régionale, stipulées dans les préconisations. Le développement environnemental est, en effet, à favoriser au même titre que le développement économique et social.

Les projets liés à la biodiversité marine dans la préservation des biens publics mondiaux sont bien mis en évidence dans cet avis. Cependant, le groupe environnement et nature a souhaité que les initiatives de coopération intègrent le développement durable au sens large, et notamment pour ce qui a trait à l’innovation. L’amendement déposé et accepté allait dans ce sens, en reprenant les préconisations de M. Galenon dans son avis sur les énergies renouvelables Outre-mer. L’Outre-mer français des trois océans a, en effet, un rôle à jouer afin de promouvoir les filières nationales dans ce domaine et favoriser le codéveloppement avec ses différents voisins mais aussi avec l’Union européenne.

Le groupe environnement et nature remercie le rapporteur pour son écoute et a voté pour cet avis de qualité.

Mutualité

En quelques années, la coopération des collectivités françaises d’Outre-mer avec leurs voisins a progressé. Cette ouverture régionale s’avère essentielle pour donner de nouveaux débouchés à nos économies ultramarines et assurer un développement social plus harmonieux.Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 39

Le groupe de la mutualité s’arrêtera sur le premier enjeu du développement de la coopération régionale et plus particulièrement sur son aspect sanitaire.

Le professeur Gentilini avait déjà pointé dans son avis du Conseil économique et social de 2006 l’importance de l’Outre-mer français dans la coopération sanitaire. Le cas de la Guyane est à ce titre révélateur, notamment à travers les questions sanitaires sur la bande côtière avec le Suriname.

L’offre de soins insuffisante pour la partie surinamaise du fleuve Maroni explique la pression exercée sur les structures hospitalières de Saint-Laurent du Maroni, voire de Kourou et Cayenne.

La création de l’ARSen 2010 a permis de mettre en place des actions de coopération bilatérale avec les autorités surinamaises et brésiliennes.

L’ARSparticipe à ce titre aux commissions transfrontalières mises en place par la Préfecture de Guyane (Conseil du fleuve sur le Maroni et Commission mixte transfrontalière avec le Brésil) et un lien constant a été mis en place avec l’Agence française du développement pour garantir la cohérence de ses programmes d’appui au Suriname avec nos politiques régionales et transfrontalières.

Des actions de coopération concrètes se manifestent d’une part, à travers le partage des données de surveillance sanitaire et la mise en place d’un programme commun de vaccination et de prévention, et, d’autre part, par la recherche de complémentarité des offres de soins entre Saint-Laurent du Maroni et Albina.

Par ailleurs, le secteur associatif et mutualiste se mobilise et récemment, la mutualité guyanaise a implanté l’antenne de Guyane promo santé (centre de référence en promotion et éducation à la santé) à Maripasoula, avec, entre autre mission, de favoriser de tels liens avec le secteur associatif surinamais oeuvrant sur le fleuve.

Cet exemple de coopération au niveau sanitaire montre l’importance d’une amélioration des outils existants en terme d’évaluation des besoins, d’une meilleure intégration de nos collectivités au sein des organisations régionales, d’une coordination forte entre les différents acteurs de la coopération régionale et d’une implication renforcée des acteurs de la société civile, souvent garants d’une bonne connaissance du terrain.

Le groupe de la mutualité souligne l’intérêt de cet avis qui, en ces temps de crises, met en avant des notions de coopération et de mutualisation pour répondre ensemble à des défis communs dans une approche globale et au service d’objectifs non seulement économiques, mais aussi sociaux, environnementaux et sanitaires.

Par conséquent, le groupe de la mutualité a voté cet avis.

Organisations étudiantes et mouvements de jeunesse

L’avis présenté au nom de la délégation de l’Outre-mer invite à créer les conditions d’un développement économique endogène en Outre-mer en intégrant davantage ces territoires au sein de leur environnement régional. Le groupe des organisations étudiantes et mouvements de jeunesse soutient vivement les recommandations qui y sont présentées.40 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

La mise en place d’une politique de coopération régionale ambitieuse  dont l’avis montre à juste titre que les dimensions sont multiples – nous semble effectivement urgente au regard de la situation économique et sociale des régions ultramarines, situation dont souffrent particulièrement les jeunes générations pour lesquelles le taux de chômage moyen est de 50 %.

À ce sujet, notre groupe est évidemment sensible aux préconisations relatives à la coopération en matière d’éducation et de formation. Seuls quatre territoires ultramarins bénéficient d’une université (Antilles-Guyane, Réunion, Polynésie française et Nouvelle Calédonie). Dans ces territoires, les formations au-delà de la licence sont par ailleurs peu développées, ce qui oblige les étudiants à s’arrêter au niveau licence ou, en particulier pour les plus favorisés, à partir pour poursuivre leurs études, dans la plupart des cas, en métropole.

Des politiques soutenant la mobilité des jeunes ont permis de répondre partiellement à ces insuffisances, cependant, l’État tend à se désengager de ces dispositifs. Les dotations pour la mobilité des stagiaires en formation professionnelle ont, par exemple, chuté de 14,7 % entre 2010 et 2012, alors que la proportion des actifs sans diplôme est deux fois supérieure Outre-mer qu’elle ne l’est en métropole et que le taux de chômage des jeunes y est extrêmement élevé. Le départ ne peut, par ailleurs, être le seul horizon proposé aux jeunes ultramarins.

Nous sommes convaincus que le développement de l’offre de formation et de recherche, le renforcement des structures universitaires et leur internationalisation, s’inscrivent dans une même dynamique. L’ouverture des universités à leur environnement régional permettra d’atteindre la masse critique et de rentabiliser les investissements en recherche et formation, investissements qui sont indispensables à l’amélioration de l’attractivité des universités ultramarines pour les ultramarins, mais également pour les étudiants et chercheurs « métropolitains » ou étrangers. Ainsi, notre groupe soutient, en particulier, la proposition visant à créer un dispositif scolaire et universitaire selon le modèle d’Erasmus dans les zones géographiques ultramarines.

Sur le plus long terme, il devrait résulter, de ce développement des coopérations et des mobilités régionales, l’émergence d’opportunités d’emploi et d’insertion professionnelle proprement locales, à même de favoriser un développement économique indépendant du soutien métropolitain et reposant sur les avantages comparatifs des territoires ultramarins.

Dans cet espoir, le groupe des organisations étudiantes et mouvements de jeunesse a voté en faveur de l’avis.

Outre-mer

Cet avis est le deuxième depuis le début de cette mandature spécifiquement consacré à l’Outre-mer. Le groupe se réjouit de la prise en compte, par le CESE, des réalités ultramarines et des enjeux de développement des territoires d’Outremer. La décision du Bureau, que le groupe salue, de transformer l’étude en rapport et avis en donne la démonstration. La qualité du travail, fruit de riches échanges en délégation et de l’implication du rapporteur, conforte la légitimité de cette formation nouvellement créée. Le groupe de l’Outre-mer tient à remercier le président Frémont pour sa disponibilité et pour son engagement dans la bonne conduite des travaux.Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 41

Cet avis a pour objectif essentiel de renforcer la valeur ajoutée des territoires ultramarins en termes de coopération avec leurs pays voisins. Par leur position dans des zones à fort potentiel de croissance et par leur dynamisme, les Outre-mer représentent un fort potentiel d’influence pour la France et pour l’Union européenne dans ces zones émergentes. Il s’agit donc de faire des collectivités ultramarines des catalyseurs de développement dans leurs espaces géographiques respectifs. Le groupe partage cet objectif. Par ailleurs, il fait sienne l’analyse des obstacles qui rendent difficile l’utilisation des instruments et leviers mis à disposition des collectivités ultramarines en matière de coopération régionale.

Le groupe partage les réponses apportées à ces problématiques. Les préconisations visent à répondre de manière précise aux dysfonctionnements existants au niveau local, régional, national et européen par une série de propositions ciblées. Dans le contexte de crise mondiale et dans la perspective de discussions importantes à venir à Bruxelles au sujet des fonds structurels pour la période 2014-2020, le renforcement de la coopération régionale constitue à la fois une chance et un véritable défi pour le développement de nos territoires ultramarins.

Le groupe a, sans réserve, voté l’avis.

UNAF

Le présent avis délibérément volontariste Pour un renforcement de la coopération régionale des Outre-mer, est une invitation à porter un nouveau regard sur les Outre-mer pour se concentrer sur leurs potentialités et en faire des catalyseurs de développement dans leurs zones géographiques respectives et des frontières actives de l’Europe.

Le groupe de l’UNAF soutient les perspectives ainsi ouvertes par l’avis dans leur grande majorité. Il salue l’équilibre ainsi trouvé faisant des régions ultra périphériques, des terrains d’expérimentation des politiques européennes, des politiques d’équilibre par rapport aux trois niveaux de gouvernance dans un intérêt collectif partagé entre l’Europe, les États et les Régions.

Le groupe de l’UNAF retient plus particulièrement deux points forts du développement de la coopération régionale des Outre-mer pour leurs effets positifs pour les familles.

Tout d’abord, l’avis met l’accent à juste titre sur l’environnement et l’énergie comme secteurs clés devant être au coeur de la coopération régionale des Outre-mer avec les pays voisins. À titre d’exemple en matière de déchets, le comité opérationnel du Grenelle de l’environnement recommande ainsi que les départements d’Outre-mer développent des échanges d’expérience avec les États présentant des similitudes en termes de contraintes géographiques et économiques. Le Conseil économique, social et environnemental, dans son avis sur les énergies renouvelables de juillet 2011, a également souligné le potentiel à valoriser dans ce domaine par la coopération régionale renforcée.

En deuxième point, le groupe de l’UNAF insiste sur la nécessité d’ouvrir des perspectives aux jeunes des Outre-mer. La situation du chômage des jeunes dans les DOM est d’une exceptionnelle gravité. Si le taux de chômage dans les DOM, toutes tranches d’âge confondues, est déjà plus élevé que la moyenne nationale, il est le plus élevé de l’Union européenne : pour les jeunes, il atteint 50 %. Le groupe de l’UNAF retient donc avec intérêt la mise en place d’un programme Erasmus régional permettant de promouvoir la mobilité des étudiants dans leur environnement géographique et favoriser ainsi les chances de réussite et d’insertion professionnelle.42 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Le groupe de l’UNAF a voté favorablement l’avis. Il formule dès lors le voeu que le travail réalisé puisse servir à l’élaboration de la future communication de la Commission européenne annoncée à la mi-2012.

En 2008, la Commission européenne a franchi une étape en retenant un nouveau paradigme : les régions ultrapériphériques, un atout pour l’Europe. Il s’agit maintenant d’approfondir, de valoriser, de mettre en musique cette nouvelle voie porteuse d’avenir. Les recommandations du CESEpourraient donc utilement inspirer le travail de la Commission.

UNSA

L’UNSA retrouve dans cet avis bon nombre de préconisations ainsi que la quasi-totalité des propositions formulées, soit au niveau de CESER ultramarins, soit lors de rencontres à Bruxelles sur la future politique européenne vis-à-vis des Régions ultra périphériques (RUP). Elle approuve globalement cet ensemble. Elle souhaite donc seulement mettre davantage l’accent sur des aspects peu ou pas évoqués dans l’avis, en premier lieu ceux relatifs à la cohérence des politiques menées par différents intervenants.

Cette question revêt plusieurs aspects :

yyD’abord, au niveau national, celui d’orientations parfois divergentes des ministères : Outre-mer, Affaires étrangères et européenne ; sans oublier les ministères techniques comme celui de l’agriculture et de la pêche. Dans ce cadre, la relation « État-Paris » est elle-même particulière.

yyEnsuite au niveau de la relation « État-Dom » :entre les collectivités (Conseil régional et Conseil général) ;

entre les collectivités, l’État et les Chambres consulaires ;

entre certains DOM également ; on note ainsi, depuis peu, une poussée de concurrence (entre Mayotte et la Réunion, par exemple !).

 

 

Ce manque de cohérence a comme conséquence des délégations françaises pléthoriques propices au jeu de la concurrence interne.

Par ailleurs, il est juste, ainsi que le préconise l’avis, de faire un point sur les différents niveaux de coopération. Cependant, politiquement, financièrement et économiquement, l’efficacité dépend largement de la proximité entretenue soit au niveau national et encore plus au niveau européen !

D’autre part, s’agissant du développement économique et social, c’est un modèle fondé essentiellement sur l’accroissement des échanges et le gain de parts de marché. Cependant, cette impulsion se heurte aux distorsions crées par le fait que la totalité des droits de douane des pays ne sera levée que dans 30 ou 40 ans, dans certains cas.

La voie que préconise l’UNSA est celle d’un véritable partenariat de production utilisant les différents atouts de chacun (financier, ingénierie, formation, production, réseau …) pour aller aussi et surtout vers l’extérieur des zones concernées.

Dans ce cadre, nos économies apparaissent comme « passablement » protégées par nos normes sanitaires et phytosanitaires, mais aussi de manière paradoxale par l’absence de liaisons maritimes (voire aériennes). Les types de productions étant pratiquement les mêmes, la mise en place de vrais réseaux de communications pour les marchandises, risque de porter un rude coup aux productions agricoles, agroalimentaires et industrielles.Pourun renforcement de lacoopération régionale des Outre-mer– 43

Par ailleurs, la plupart des dossiers relèvent aujourd’hui de la Commission européenne. Si l’UNSA approuve ses propositions, elle pense que la politique de l’UE(orientation, lois, mesures) ne peut s’appliquer aux DOM dans les mêmes termes que ceux prévalant sur le territoire continental de l’UE : les mesures liées à la compétitivité, à la pêche, aux accords commerciaux doivent tenir compte d’enjeux et de défis futurs spécifiques (politique chinoise, indienne, par exemple). Certains dispositifs européens provoquent des effets pervers (délocalisations), tandis que d’autres se révèlent difficiles à mettre en place compte-tenu des structures locales inaptes à monter des dossiers répondant à des critères inexistants, en particulier ceux liés au commerce mondial (lancement d’appels d’offre, par exemple). Pour l’UNSA, « l’intérêt supérieur de l’UE », pour susciter l’adhésion, doit faire en sorte que ses représentants, tant à Bruxelles que dans les zones concernées, aient aussi pour mission de défendre les intérêts des RUP vis-à-vis des pays voisins.

Ces remarques étant faites, l’UNSA a voté l’avis.44 – Avis DUCONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ETENVIRONNEMENTAL

Scrutin

Scrutin sur l’ensemble du projet d’avis

Nombre de votants 194

Ont voté pour 189

Se sont abstenus 5

Le CESEa adopté.

Ont voté pour : 189

Agriculture

MM. Bailhache, Barrau, Bastian, Mmes Beliard, Bernard, Bocquet, Bonneau, Dutoit, MM. Giroud, Gremillet, Mmes Henry, Lambert, MM. Pelhate, Pinta, Mmes Serres, Sinay, M. Vasseur.

Artisanat

Mme Amoros-Schwartz, M. Crouzet, Mme Gaultier, MM. Griset, Lardin, Le Lann, Mme Sassano.

Associations

Mme Arnoult-Brill, MM. Da Costa, Leclercq, Pascal, Mme Prado, M. Roirant.

CFDT

M. Blanc, Mme Briand, M. Duchemin, Mme Hénon, M. Honoré, Mme Houbairi, MM. Jamme, Le Clézio, Legrain, Malterre, Mme Nathan, M. Nau, Mmes Nicolle, Pichenot, Prévost, M. Quarez.

CFE-CGC

M. Artero, Mmes Couturier, Couvert, MM. Dos Santos, Lamy, Mme Weber.

CFTC

M. Coquillion, Mme Courtoux, MM. Ibal, Louis, Mmes Parle, Simon.

CGT

Mme Crosemarie, M. Delmas, Mmes Doneddu, Dumas, M. Durand, Mmes Geng, Hacquemand, Kotlicki, MM. Lepaon, Mansouri-Guilani, Michel, Minder, Prada, Rozet, Teskouk, Mme Vagner.

CGT-FO

M. Bellanca, Mme Boutaric, M. Chorin, Mme Fauvel, M. Lardy, Mmes Millan, Nicoletta, M. Peres, Mme Thomas, M. Veyrier.

Coopération

Mme de L’Estoile, M. Lenancker, Mmes Rafael, Roudil, MM. Verdier, Zehr.

Entreprises

M. Bailly, Mme Bel, M. Bernardin, Mmes Castera, Colloc’h, Duhamel, Duprez, Frisch, Gri, Ingelaere, MM. Jamet, Lebrun, Lejeune, Marcon, Mariotti, Mongereau, Placet, Pottier, Mme Prévot-Madère, MM. Ridoret, Roubaud, Mme Roy, M. Schilansky, Mmes Tissot-Colle, Vilain.

 

social position

Partager cet article